Le combat des femmes pour un Iran libre

par Hassina Dris, journaliste

Le 8 mars prochain se déroulera la Journée internationale de la femme. Pourtant, les femmes iraniennes n’auront pas attendu cette journée pour se faire entendre. À l’origine des récentes manifestations qui secouent la République islamique, elles ont bien l’intention de renverser l’une des seules théocraties encore en place.

Une manifestante iranienne à Téhéran, le 30 décembre 2017 I STR / AFP

Depuis décembre 2017, les femmes iraniennes en quête de liberté se sont érigées en figures héroïques dans plusieurs dizaines de villes du pays. Leur souhait : renverser la dictature religieuse en place et l’islamisme radical qui en découle, depuis la révolution islamique de 1979. Ces événements en faveur de la chute du régime ont fait l’objet d’une conférence à Paris intitulée Les femmes, la force du changement : soulèvement en Iran et le rôle des femmes, le 17 février. Maryam Radjavi, leader de la résistance en Iran a pris la parole, ainsi que Rama Yade, ex-secrétaire d’Etat chargée des Affaires étrangères et des droits de l’homme, Ingrid Betancourt, ex-candidate à l’élection présidentielle en Colombie et Aude de Thuin, fondatrice de Women Forum.

Des femmes en première ligne

Quatre femmes soulignent le rôle majeur d’autres femmes dans ce soulèvement contre le régime, à l’image d’une Iranienne prise pour symbole de ce soulèvement grâce à une photo capturée lors d’une manifestation à Téhéran, fin décembre. Envahie par une épaisse fumée de gaz lacrymogène, elle était là, fière, le poing levé. Face aux gardes, elle criait :

A bas le dictateur !

Nombreuses sont celles à avoir osées comme le souligne Ingrid Betancourt. Vida Movahed en est un autre exemple. Connue comme celle qui a brandit son voile dans les rues de la capitale en signe de protestation. Attention toutefois, il serait faux de croire que le combat des manifestants s’arrête à lever l’obligation de porter le voile. Aude de Thuin insiste sur ce point :

La presse occidentale se contente de dire que les femmes osent enlever leur voile, sans parler de leur rôle réel et de leur participation au soulèvement. Comme si le fait d’enlever son voile est le seul droit qu’elles réclament.

Ce qu’elles revendiquent, ce sont de nombreux autres droits : celui de pouvoir divorcer, celui d’accéder à l’aide sociale. Des droits supprimés sous Khomeiny, Guide suprême à l’origine du renversement du Shah en 1979. Ce qu’elles veulent aussi, c’est en finir avec la corruption, sortir d’une situation économique difficile où le chômage fait rage, vivre libre en étant l’égal des hommes et faire de l’Iran, une véritable république.

Organiser la révolution

Rama Yade l’affirme, le monde se rappellera que loin d’être une révolte sans lendemain, ces journées rouges à Téhéran, Kermanshah, Izeh, Toyserkan, Mashhad, Tabriz, sont l’annonce d’une révolution. Vous avez écrit une page de l’histoire de l’Iran.

Cependant, comme toujours dans cet état chiite, la répression fait rage. Le Guide suprême incarné par Ali Khamenei depuis 1989, et les gardiens de la révolution islamique, ne cessent de meurtrir le peuple. En censurant les réseaux sociaux, en gazant les manifestants, en les emprisonnant, ou pire, en les tuant, comme ce fut encore le cas pendant les manifestations. Faire front pour renverser le régime. Maryam Radjavi en est persuadée, les femmes doivent poursuivre le soulèvement.

Pour ça, il faut s’organiser[…] Enseignez aux femmes dans toutes les villes à former un millier d’Achraf. Enseignez-leur à créer des conseils de résistance.

Dans cette bataille pour l’égalité, la liberté, et la dignité, Rama Yade rappelle que chacun à un rôle à jouer, même en occident :

La condition, le devoir, la responsabilité, plus que jamais : rester aux côtés du peuple iranien, leur faire sentir notre soutien. C’est notre liberté à tous qui se joue à Téhéran.