Place à l’accusation au procès Fillon: le parquet national financier prend mardi après-midi ses réquisitions contre l’ancien Premier ministre, sa femme Penelope et son ancien suppléant, jugés à Paris pour les soupçons d’emplois fictifs de Mme Fillon.

L’ancien Premier ministre François Fillon arrive au tribunal, le 27 février 2020 à Paris I AFP/Archives / STEPHANE DE SAKUTIN
Les prévenus encourent jusqu’à dix ans d’emprisonnement, de lourdes amendes et des peines d’inéligibilité. François Fillon, retraité de la politique après une campagne présidentielle phagocytée par cette affaire en 2017, risque le plus gros. Un brin provocateurs, les deux procureurs du parquet national financier (PNF), Aurélien Létocart et Bruno Nataf, ont assuré son épouse de leur empathie. Principal volet du procès, les soupçons de détournement de fonds publics entourant les emplois d’assistante parlementaire de Penelope Fillon, poursuivie pour des prestations fictives ou surévaluées, devraient occuper la majeure partie du réquisitoire. Toute la question est de savoir si les activités de Mme Fillon dans la Sarthe auprès de son mari député et du suppléant de ce dernier, Marc Joulaud, méritaient d’être rémunérées dans le cadre de contrats d’assistante parlementaire. Entre 1998 et 2013, cette Galloise a perçu au total 613.000 euros nets – un million d’euros bruts – au titre de trois contrats connus seulement de quelques proches, pour un travail aux preuves matérielles quasi inexistantes.
A l’issue de débats parfois houleux entre défense et accusation, les travaux de Penelope Fillon restent difficiles à évaluer. Il en ressort une image floue dans laquelle se mélangent son statut d’épouse et son aide à François Fillon, quels que soit son mandat ou ses fonctions, avec ou sans contrat de collaboratrice parlementaire. Les procureurs estiment que les activités décrites relèvent davantage du rôle social d’un conjoint d’élu que d’un emploi d’assistant parlementaire à proprement parler. Il existe à leurs yeux une confusion entre la vie sociale de Penelope Fillon, la vie professionnelle dont elle se prévaut et la vie politique de François Fillon. Cette notion de rôle social de l’épouse a été maintes fois raillée par l’ancien chantre de la droite conservatrice, qui s’en est pris à l’archaïsme du PNF. Les époux Fillon ont au contraire défendu un travail certes discret et majoritairement immatériel, mais indispensable à la carrière de François Fillon. Selon eux, Penelope Fillon assurait un rôle de donneur d’ordres pour le courrier arrivé au manoir de Beaucé, participait à des événements locaux, recueillait les doléances d’habitants… autant de tâches rentrant dans les larges attributions d’un collaborateur parlementaire. François Fillon, qui n’a pas caché son mépris pour le PNF, a plusieurs fois brandi la séparation des pouvoirs s’agissant du détail des tâches et des salaires. Il s’est évertué à convaincre le tribunal correctionnel que ce travail est d’autant plus varié lorsque le collaborateur est le conjoint, une pratique désormais interdite. Si la défense a semblé reprendre des couleurs en versant aux débats une trentaine de témoignages de Sarthois attestant de diverses activités de Mme Fillon pour son mari, les procureurs devraient quant à eux insister sur des déclarations importantes, centrales de l’intéressée dans la presse. En 2007, Penelope Fillon avait affirmé au Sunday Telegraph n’avoir jamais réellement été l’assistante de son mari ou quelque chose de ce genre. Elle regrettait que ses enfants ne la considèrent que comme une maman et disait aimer observer le monde au travail. La défense plaidera mercredi.