Une candidature de Zemmour à la présidentielle pourrait rebattre les cartes. Un scénario redouté par la majorité qui compte sur la présence de Marine Le Pen au second tour.
Annoncé en hausse dans les sondages depuis plusieurs semaines, Éric Zemmour, qui ne s’est pas encore déclaré officiellement candidat, pourrait faire office d’épouvantail à la prochaine présidentielle. La montée en puissance du polémiste inquiète notamment du côté de LREM, rapporte le journal Libération. Crédité de 8 à 11% d’intentions de vote selon les enquêtes, l’ex-éditorialiste de CNews marche en effet sur les plates-bandes de Marine Le Pen, laquelle semble faire office de rivale idéale pour Macron au second tour.
Le meilleur adversaire pour Emmanuel Macron, c’est Marine Le Pen. Et au milieu, il y a un fou furieux qui est en train de grignoter la moitié des voix du RN. Si on se retrouve face à Xavier Bertrand ou Valérie Pécresse au second tour, on est dans la merde,
confie ainsi un député LREM à Libération.
Pire encore : la candidature du polémiste pourrait mettre en péril la présence de Macron au second tour, pour peu qu’un autre candidat séduise l’électorat centriste, cher à la majorité. Le Président sortant se retrouverait alors pris en sandwich, entre un Zemmour très droitier et, par exemple, un Yannick Jadot au discours recentré.
Ça change la donne! […] Pour la première fois depuis 2016, il est question que le RN ne soit pas au deuxième tour. Le centre droit n’aura qu’un candidat, capable de faire une bonne campagne. Pour peu qu’un Yannick Jadot grignote un peu au centre,
explique un autre membre de la majorité à Libération.
En avril dernier, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal avait pourtant déclaré rêver d’un second tour de la présidentielle « sans Marine Le Pen ». À en croire les confidences de la majorité, un second tour sans Macron n’est plus à exclure non plus.
Mais au-delà des calculs politiciens, Éric Zemmour pourrait aussi être en mesure d’imposer ses thèmes de prédilection dans le débat politique, jusqu’à l’échéance électorale. Mi-septembre, le polémiste avait déclaré sur RTL que celui qui « impose sa question » serait en mesure de l’emporter en 2022. Il avait ajouté que l’immigration serait selon lui l’enjeu central de la présidentielle. Un récent sondage Elabe lui donne d’ailleurs raison, listant l’immigration comme l’un des sujets majeurs de préoccupation des Français pour 2022, derrière le pouvoir d’achat et la sécurité. L’écho que rencontrent aujourd’hui ces enjeux sécuritaires et migratoires dans l’opinion fait d’ailleurs dire à certains que l’électorat français se « droitise ».
Il y a effectivement un glissement vers la droite de l’offre politique, notamment sur les questions culturelles et identitaires […] La présence d’un bloc de droite radicale de l’ordre de 30% (si l’on additionne les intentions de vote Le Pen, Zemmour et Dupont-Aignan) rend la précampagne assez inédite,
explique ainsi à Frédéric Gonthier professeur de sciences politique à Sciences Po Grenoble.
S’il tarde toujours à abattre ses cartes, Zemmour semble décider à se lancer dans la course à la présidentielle. Le polémiste a envoyé des courriers à plusieurs élus pour tenter de rassembler les parrainages nécessaires à son entrée en lice. À l’occasion de la sortie de son livre La France n’a pas dit son dernier mot, l’essayiste français a enchaîné les conférences, que certains ont qualifiées de meetings politiques déguisés. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) avait par ailleurs décidé de décompter son temps de parole, ce qui a précipité son départ de CNews.