Durant cette crise sanitaire et la fermeture des cinémas, la rédaction de Quotidien Libre vous propose tous les mercredis une sélection de nouveautés disponibles sur les plateformes de streaming ou en VOD.
The Nest, mariage toxique – Remarqué en 2011 avec son premier film paranoïaque, Martha Marcy May Marlene, déjà primé à Deauville, le réalisateur Sean Durkin brosse, avec The Nest, présenté à Sundance, un portrait au vitriol d’un mariage survivant à ses mensonges. Rejetant ses origines populaires, désirant en imposer aux riches, Rory est un modèle de masculinité toxique. Sous ses traits, Jude Law retrouve son charisme inquiétant de jeune premier flambeur. Son visage lisse est une énigme que la caméra fixe de loin, occupée qu’elle est à suivre les moindres tressaillements de la prodigieuse Carrie Coon (The Leftovers). Pas dupe, son Allison rendra humiliation pour humiliation. Ces tensions convergent pour mieux imploser lors d’un dîner en ville, jubilatoire jeu de massacre façon Qui a peur de Virginia Woolf ? Rory et Allison plongent dans une spirale sans retour, une nuit de révélation, de sauvagerie quasi- hallucinatoire. Un thriller entre sombre chronique familiale et descente aux enfers horrifique. Un chef-d’œuvre dans son genre. Disponible en VOD sur MyCanal
Palm Spring, un jour sans fin – Vous trouvez qu’entre confinement et couvre-feu, nos journées se ressemblent ? Plaignez donc le pauvre Nyles. Piégé dans une boucle temporelle, le trentenaire nonchalant se réveille toujours le matin du mariage d’Abe et Tella, de lointains amis. Ces noces qui se déroulent au milieu du désert californien se terminent toujours par l’infidélité de la petite amie de Nyles. Sur ce scénario calqué sur le modèle d’Un jour sans fin avec Bill Murray, Max Barbacow, dont l’humour s’avère beaucoup plus potache et trash façon American Pie, greffe un rebondissement délicieux : Nyles n’est pas le seul à revivre inlassablement ces 24 heures de débauche. Il a entraîné dans cette galère le ronchon Roy (J.K. Simmons ravi de perdre la tête) et la belle Sarah (Cristin Milioti). Dans sa première partie, Palm Springs qui a suscité des enchères records au festival de Sundance s’amuse à montrer les mille et une manières dont l’omniscience de Nyles (Andy Samberg, dilettante prodigieux) et de Sarah leur permet de pimenter et de gâcher la fête. De la déclamation du discours parfait aux accidents les plus improbables. Les tentatives futiles du duo pour échapper à l’attirance qui les unit sont toutes aussi joyeuses. Et constitue peut-être la clef de leur liberté. Là où Bill Murray essayait d’aligner une journée parfaite et altruiste, Nyles et Sarah semblent s’interroger. C’est, quoi, quel sens donner à sa vie quand on a l’éternité devant soi ? Disponible le 12 février sur Amazon Prime Video
La Mission, western psychologique – En 1870, le capitaine Kidd, ancien confédéré, sillonne le Texas pour apporter les nouvelles à des foules plus ou moins illettrées. Les faits divers sont déclamés de sa voix de baryton – on la reconnaîtrait les yeux fermés. Il serait dommage de ne pas les garder ouverts pour admirer La Mission, ce western épique, sombre, inspiré. L’homme semble en avoir gros sur le cœur. La guerre ne lui a apparemment pas laissé que des bons souvenirs. Ce vétéran verra sa vie bouleversée par la découverte d’un noir lynché et d’une gamine de 10 ans abandonnée. Elle est deux fois orpheline, puisque ses parents ont été massacrés par les Indiens qui l’ont élevée et qui ont été tués à leur tour. L’homme a une mission : ramener la petite à ce qui lui reste de famille. D’ici à San Antonio, il y a 800 kilomètres. Au début, elle l’irrite. Il ne sait pas par quel bout la prendre. Elle s’accroche à ses souvenirs, avec ses yeux bleus, son air buté, ses lèvres toujours prêtes à être déformées par le chagrin. On le sent envahi de regrets, dévoré de nostalgie. Son pays continue à se déchirer. Ces temps sont difficiles. Par moments étrangement contemplatif, Paul Greengrass délaisse la frénésie des Jason Bourne. L’action se déclenche lorsque les héros ne peuvent pas s’en sortir autrement. L’Ouest a ses lois. Cela donne quelque chose entre La Prisonnière du désert (une scène évoque le fameux plan où la silhouette de John Wayne s’encadre dans la porte du ranch) et Cent dollars pour un shérif. Solide, laconique, protecteur, Tom Hanks, avec sa barbe blanche de dieu antique, porte le film sur ses épaules. Helena Zengel, repérée dans Benni, lui tient tête, au milieu de ces tempêtes de sable, de ces prairies jonchées de cadavres de bisons. Elle est au bord des larmes et, tout d’un coup, son visage s’éclaire d’un sourire radieux. Pour elle, on affronterait des blizzards et les fantômes du passé. C’est encore loin, la paix ? Disponible sur Netflix