Le navigateur de 35 ans, qui a notamment participé à la route du Rhum, estime que la course au large n’a plus sa place face l’urgence climatique.

Stan Thuret a pris une décision radicale. Le skippeur français, 25e de la dernière route du Rhum en Class40, a annoncé dans un long message publié sur Facebook à la mi-février qu’il mettait fin à sa participation aux épreuves de course au large, et donc à sa carrière, pour « raison écologique ».
« J’ai décidé d’arrêter la course au large telle qu’elle existe aujourd’hui en 2023. L’urgence climatique et l’effondrement de la biodiversité sont incompatibles avec la manière de vivre de la course au large et la compétition », explique d’abord le navigateur de 35 ans à ses abonnés.
Avant de détailler : « La compétition avait cette vertu-là, d’inciter à donner le meilleur de soi-même face à son bateau et à l’océan, et de rassembler au même endroit au même moment d’autres fous comme moi. Mais aujourd’hui, je n’ai plus envie de compétition sans limite à la performance. Car c’est un non-sens total. Car le prix à payer est lourd. »
Les skippeurs « égoïstes, déconnectés de la réalité »
Stan Thuret critique notamment les autres skippeurs, qu’il compare à des « enfants qui jouent entre eux et se disputent le meilleur jouet sans regarder ce qui se passe autour. De manière très égoïste. Avec beaucoup d’indécence. Complètement déconnectés de la réalité sociale et environnementale. » Et de le reconnaître : « Je le sais, car j’ai été un de ces enfants gâtés. »
Selon l’Accord de Paris, il faudrait que chaque habitant n’émette pas plus de 2 tonnes équivalent CO2 par an d’ici à 2050 pour limiter les impacts du changement climatique. Or, un Français est à environ 9 tonnes par an. Un bateau Class40, c’est 10 tonnes, pointe Stan Thuret. Et un Imoca, 600 tonnes. « Tout le monde se regarde, personne n’agit véritablement. Nous sommes très loin d’être à la hauteur des enjeux », alerte-t-il.
Ce mardi 21 février, Stan Thuret a détaillé le point de départ de sa démarche à France Inter. Pour lui, tout a commencé en 2017, lors de la mini-transat, une traversée de l’Atlantique. « J’ai passé 30 jours sur l’eau et j’ai découvert l’autonomie, qu’on pouvait vivre avec très peu d’électricité, très peu d’eau. Quand tu reviens à terre, ça te fait vraiment une claque », a-t-il expliqué.
« Le métier de skipper ne fait pas du bien à la planète »
« Plus tu creuses, plus tu te rends compte que ça ne va pas, dans le domaine de la voile comme dans la société en général. (…) Le modèle que l’on défend, qui est de dire que la performance, c’est d’aller plus vite et d’être le premier, ce n’est plus possible », a-t-il ajouté.
Il insiste : « Ce métier de skipper, il n’est plus soutenable, il ne fait pas du bien à la planète. Ce métier, s’il ne prend pas un virage, il va être pointé du doigt dans quelques années, comme on pointe déjà du doigt un footballeur comme Karim Benzema qui passe ses vacances à Miami, fait du jet ski et se déplace en avion à gogo. »
Pour éveiller les consciences, Stan Thuret a donc décidé de sacrifier sa carrière. Resté aux Antilles après la route du Rhum pour éviter de prendre l’avion, il va rentrer en France en prenant le départ du Défi Atlantique, une transatlantique entre la Guadeloupe et La Rochelle, qui débutera le 1er avril prochain. Ce sera sa dernière course.