Après la crise covid, la guerre en Ukraine et désormais la crise de l’énergie… Est-on condamné à une gestion de crise permanente ? Est-il possible de gérer les urgences du présent tout en pensant l’avenir ?
Nos confrères de la RTBF ont interrogé l’épidémiologiste Belge Marius Gilbert, directeur de Recherche au Fonds de la Recherche Scientifique (FNRS) et vice-recteur à la recherche pour l’Université Libre de Bruxelles (ULB. Avec lui, ils ont remonté le fil de la crise covid : « Mon sentiment, dans la gestion de cette crise, c’est qu’on a été dans l’urgence à peu près tout le temps. Au début c’est normal, mais au fil des mois quand on reprend la maîtrise de l’épidémie, on pourrait s’attendre à ce que l’on commence à penser des solutions plus structurelles mais ça, à ma connaissance, cela a très peu existé ! »
On oublie de s’attaquer aux causes systémiques de la crise
Marius Gilbert prend l’exemple de la ventilation : » on a dit plusieurs fois que si on avait une meilleure ventilation des lieux publics, il y aurait des tas de bénéfices par rapport aux infections respiratoires… mais c’est une solution qui passe toujours au second plan, par rapport aux solutions rapides. » Et, son interprétation de ça… » c’est que le fait de se dire en crise nous fait surtout envisager des solutions pour revenir à l’état de non-crise, à l’état antérieur. On oublie du coup de traiter les problèmes systémiques qui nous ont amenés-là ! Et si on ne les traite pas, le risque est grand de toujours passer de crise en crise.
La tentation de travailler en silos
L’épidémiologiste, quand il regarde dans le rétroviseur de cette crise covid pointe encore un autre problème : « Parfois on a des solutions qui sont dans les compétences d’un ministre mais qui pourraient avoir des bénéfices dans les compétences d’un autre ministre et malgré tout ils travaillent souvent de façon assez segmentée « . Marius Gilbert pointe un exemple concret : » Prenez notre assiette : on sait qu’il y a un grand nombre de maladies qui sont liées à notre alimentation, on sait aussi qu’il y a tout un enjeu à développer une alimentation moins énergivore, plus respectueuse des écosystèmes… et donc avec une seule mesure de promotion d’une alimentation de qualité qui ne soit pas réservée aux plus nantis, on peut avoir une meilleure santé, une agriculture plus durable et plus résistante aux fluctuations du climat ! »
Alors est-il possible de penser le long terme, pris dans le tourbillon d’une crise ?