Le traumatisme d’une rescapée d’un attentat, des motards pros du « cross bitume » qui sillonnent la campagne roue en l’air, un gouvernement mettant en place une politique d’euthanasie pour les seniors… Que faut-il voir cette semaine? Découvrez notre sélection cinéma.
Revoir Paris. Drame d’Alice Winocour (1h45) – Mia a réchappé d’un attentat. Un soir, cette traductrice du russe s’était abritée de la pluie dans une brasserie. Des tueurs ont déboulé, ont tiré sur la clientèle. Depuis, la survivante a la mémoire en lambeaux. Plus rien n’est comme avant. Mia se sent coupable. Elle participe à un groupe de soutien, croise d’autres rescapés. Une femme l’accuse de s’être enfermée dans les toilettes du restaurant sans penser à ses voisins de table. Mia ne garde aucun souvenir de cet épisode. Elle croise à ces réunions un banquier qui a la jambe hérissée de fixateurs externes.
Benoît Magimel, intense et pénétré, décidément impeccable, d’un humour serein, d’une chaleur vibrante. Alice Winocour suit à la trace cette quadragénaire déboussolée, visitant des chambres d’hôpital, s’installant dans le studio d’une amie dont les fenêtres donnent sur la place de la République. Une infinie pudeur règne sur chaque séquence. Winocour repousse le sensationnel du bout du pied. Bien sûr, elle s’inspire du 13 novembre 2015. Il fallait une Virginie Efira pour porter à bout de bras Revoir Paris, ce long-métrage qui vole à cent coudées au-dessus de ses concurrents du moment.
Rodéo. Drame de Lola Quivoron (1 h 50) – Présenté au Festival de Cannes en mai dernier, ce premier film de la jeune Lola Quivoron est un film énervé. Un drame à l’insolence des premières fois. Rodéo plonge dans l’univers des braquages de motos volées. Loin d’Easy Rider, il montre des motards pros du « cross bitume » qui sillonnent la campagne, roue en l’air, cheveux au vent, au son vrombissant des pots d’échappement.
Alors que ces dernières semaines, le sujet des rodéos urbains a beaucoup occupé l’actualité, le film mérite qu’on s’y intéresse. Il brosse le portrait d’une héroïne sauvage (incarnée par Julie Ledru) qui rêve d’organiser le braquage ultime. C’est heurté, enfiévré, dangereux. Mais tellement vrai vivant ! L’adrénaline remplace l’essence.
Plan 75. Science-fiction de Chie Hayakawa (1h52) – Primé à Cannes, ce premier film d’anticipation japonais imagine comment le gouvernement met en place une «politique d’euthanasie légalisée» pour les seniors. Le film suit en parallèle cinq personnages, dont Michi (formidable Chieko Baisho), une attachante veuve usée par la solitude et les difficultés financières, qui accepte d’être candidate quand elle ne peut plus payer son loyer. Il ne se passe rien de très spectaculaire dans Plan 75. Tout est suggéré. L’horreur est intérieure. Le principe est simple. Le gouvernement ne lésine pas sur la propagande et les spots publicitaires qui inondent les médias. Des musiques douces sont diffusées à la radio et dans les rues des grandes villes. Il règne comme une forme d’anesthésie générale de la société. Plan 75 est un long-métrage perturbant, bouleversant, très soigné sur le plan visuel, filmé avec tellement de réalisme qu’il en devient plus effrayant qu’un film postapocalyptique.