A Richerenches, le Chef Nicolas Pailhès propose une carte hors clichés, loin des étiquettes, bien dans le courant de l’époque et surtout modeste. Ça éveille le néophyte, ça réveille l’expert.

Quand elles ne portent pas des noms piochés dans les pages de magazines cultureux ou faussement fashionable, certaines tables d’aujourd’hui cultivent une sémantique simple et rassurante. Voici donc L’Escapade, avec son comptoir nimbé de chaleur, celle caressante sur tapis acoustique jazzy; ses tables à tenir un siège – il fait bon s’y attarder; ses murs en «boîte à couleurs» hispanisantes, Sandrine l’épouse du Chef n’est pas loin; ses « gnoles » savantes au bar quand il en reste; sa vaisselle vitaminée sur serviette accordée et son néon au-dessus d’une cuisine en avant-scène. Le brin de resto parfait qui met en appétit le genre humain.
Ça tombe bien, parce que sous le néon, derrière les fourneaux, le taulier en est un. Nicolas Pailhès, franco-ardéchois passé à l’école hôtelière de Nice et Paris, désormais en direct chez lui, sait s’entourer d’une équipe spontanée à balader le tableau des menus comme un tract. Et le tract fort dans ses slogans, hein ! Pas de trucs ou de machins pontifiants, juste de la sincérité.
Précédé de sa réputation, de son experience qui le fait Chef de cuisine confirmé par ses pairs, Nicolas Pailhès, concentré sur ses ingrédients de choix, ne tremble jamais quand il travaille et dévoile une nouvelle recette aux habitués comme aux pèlerins curieux. Parce qu’à L’Escapade, restaurant de tous les feux et, pour le moins, garant d’un vrai savoir-vivre, le Chef est attendu comme pas permis dans une plénitude culinaire qui ne déçoit jamais; une cuistance remarquable à installer le déjeuner comme le souper en manière de conte gastronomique. Le service, dans son ballet franc, ouvre ici une dégustation éclairée. En murmurant à l’oreille de l’affamé : «Il était une fois», il n’y aurait là rien de bête et de déplacé à dire, bien au contraire.
Voilà une cuisine de l’enchantement, subtile à embringuer dans son monde, vers ce pays de la truffe noire où chaque composition dévoile un jus, un velours, un bouillon, une lapinerie en terrine ou encore un frisson de cuillère. Derrière le passe-plats, le Vaucluse tout entier n’a plus qu’à accompagner le Monsieur en veste, laissant ainsi briller son soleil et reconnaître un jour des étoiles méritées.
À L’Escapade, ces temps-ci, la truffe reine du terroir s’amourache d’un Bouillon de volaille beurre truffé, œuf parfait ou de Légumes d’hiver et truffes crues en hors-d’œuvres. Le Merlu de ligne de Méditerranée poêlé, purée de céleri truffée, réduction vin rouge discute belle coction avec le Filet de pintade farci aux truffes, légumes racines, sauce suprême. Le Demi-pigeonneau braisé au vin et truffe arbitre cette causerie haute en saveurs avant que la Ganache chocolat noir ou le Paris-Richerenches, tous deux gentiments caramélisés, ne prospèrent sur les tables en guise de dessert. Le restaurant présente chaque semaine trois entrées, trois plats et trois desserts. Les suggestions changent selon les produits disponibles et de saison, ce qui garantit la fraicheur de la popote.
Côté vins, la carte favorise quasiment ceux qui sont issus du coin. Les préférences de la maison vont notamment au Domaine Coste Chaude de Vincent Tramier – le blanc « Trilogy » 2018 est à découvrir. Les cuvées du Château de Campuget et/ou du Domaine Bonetto Fabrol sont élevées pour accompagner les plats Ô combien pimpants du Chef. Une aubaine.
Pour célébrer les 15 ans d’existence de L’Escapade et rendre hommage à son arrière grand-mère Juliette Combe, aide cuisinière au sein de nombreux établissements Nîmois, Nicolas Pailhès publie un livret de ses propres recettes : « Mes 15 recettes autour de la truffe noire ». On y rencontre le Velouté de légumes racines truffées, parmesan croustillant ; la célèbre Brouillade aux truffes ou encore le Tartare de veau de lait truffé, vinaigrette acidulée et neige truffée. Les Pommes au four à la Richerenchoise côtoient la Poire Elisabetta, recette d’Elisabeth Fontannaz-Voumard, disciple d’Escoffier, journaliste et amie du Chef. Muriel Pellegrin et Alvaro Fernandez Prieto signent les photos.
L’Escapade des bons vivants comme le dit le Gault et Millau (1 Toque 2021) propose une cuisine sincère, boursouflée de vérité. Celle d’un Chef éclairant que Quotidien Libre s’empresse de livrer.
Restaurant L’Escapade, 247 avenue de la Rabasse 84600 Richerenches (Vaucluse). Prix : €€€ (en période truffes noires), €€ (hors saison truffes). Sur réservation t/ 04 90 28 01 46. Fermeture dimanche et lundi. Plus de renseignement ici
À NOTER : Mardi 25 janvier 2022, Nicolas Pailhès présentera son Sablé Richerenchois (sablé au parmesan, surmonté d’une mousse de brebis frais truffé et quelques zestes de clémentine Corse) au Salon méditerranéen de la restauration & de l’hôtellerie « Food’in Sud » à Marseille Chanot, 114 rond-point du Prado, Marseille (VIIIe). Plus de renseignement ici