SOCIÉTÉ I Ce mercredi 20 juin, se déroule la Journée mondiale du réfugié. Une jour particulier pour avoir plus qu’une pensée passagère à tous ceux contraints de fuir leur pays en guerre, ceux qui échappent à la persécution, dans l’espoir de cesser de risquer leur vie à chaque instant.

La Journée mondiale du réfugié est une date clé qui rappelle à tous dans le monde que les réfugiés sont des personnes qui fuient la guerre et les persécutions et qui ont donc besoin d’une protection internationale, accompagné de solutions pour un avenir meilleur. Si la politique n’est pas seule responsable du désastre, viendront bientôt s’ajouter -de façon inquiétante- les réfugiés climatiques, ceux qui voient leurs côtes, leurs terres, leurs cultures, irrémédiablement rongées au quotidien par les eaux. Un jour de compassion sur 365, c’est peu, mais l’idée si belle soit elle, fait office de déclencheur. Elle a permis notamment de lancer des initiatives citoyennes à l’instar du Refugee food festival (RFF), créé par Food Sweet Food et soutenu par l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).
Le RFF a lieu cette année à Paris, jusqu’au 24 juin prochain. Mais il prendra aussi corps à Lille, Lyon et Marseille et d’autres villes d’Europe, des États-Unis ou d’Afrique du Sud à d’autres dates. Le principe : des chefs installés accueillent des réfugiés, les coachent et leur confient les rênes de leur restaurant pour un brunch, un déjeuner, un dîner. Le but : changer notre regard sur ces hommes et femmes qui ont dû soudain abandonner cruellement leur vie d’avant ; essayer de les insérer dans notre monde professionnel exotique ; démontrer que le partage et celui de la cuisine tout particulièrement, est un symbole fort de paix.
Un exemple parmi d’autres
Pour cette troisième édition, de nombreux chefs parisiens ont répondu présent à l’appel et, parmi eux, Charles Neyers, jeune chef du tout nouveau restaurant La Traversée, ouvert depuis un an, qui avait déjà accueilli l’année dernière une jeune Ivoirienne, Afou, pour un brunch haut en couleurs :
C’était assez sportif, nous étions un peu paniqués, mais finalement, tout le monde a adoré, l’équipe comme les clients. Et quand on m’a proposé de recommencer, j’ai dit oui sans hésiter ! Parce qu’il est indispensable de découvrir d’autres cultures.
Cette année, à La Traversée, l’Ivoirienne Afou a cédé sa place au Syrien Haïtam Karajay pour un voyage gustatif tout aussi surprenant et instructif. Réfugié politique, Haïtam est arrivé en France en 2015. S’il a choisi de s’investir dans la cuisine, jusque-là un hobby, c’est dans le cadre de KodiKo, programme d’insertion des réfugiés en entreprise. Il a ensuite suivi une formation à l’école de Thierry Marx, avant de décrocher un stage à La Régalade :
La cuisine ce n’était pas du tout mon métier ; mais ma mère, aujourd’hui en France avec moi, a toujours cuisiné, et j’ai voulu reprendre les recettes de mon enfance.
De sa vie à Damas, Haïtam garde le souvenir des plats parfumés que préparait sa mère, précisément, dont les racines sont à la fois Damascène et Alépine.
Ces cuisines sont très différentes, même si ici, en France, on parle simplement de cuisine syrienne.
Haïtam a refait sa vie en France et ne pense pas retourner en Syrie, même si la guerre cessait :
Tout serait à recommencer là-bas ! Mais je ne dis pas que je n’y construirais pas quelque chose, bien évidemment un projet autour de la cuisine…
Le métier de cuisinier demande du temps et de l’énergie, qu’Haïtam a à revendre, avec ses journées de 14 heures. Et quand on lui demande comment il veut faire aimer les parfums de son pays natal à Paris :
Je veux mélanger Syrie et France : les saveurs de la cuisine syrienne et les présentations élégantes de la française !
Son rêve ? Être chef à domicile :
Je l’ai fait une fois, et je le fais souvent, bénévolement, pour des amis. Parce qu’il aime la France, pays où dit-il, il a été très bien accueilli.
Et par Charles Neyers aussi, qui parle de coup de cœur.
J’apprends tellement avec lui, et j’adore ça ! souligne le Chef de La Traversée.
Créé au lendemain de la seconde guerre mondial, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) est aujourd’hui, 67 ans plus tard, toujours actif à travers le monde. Très présents sur le terrain, ses membres interviennent auprès des populations déplacées et réfugiées dans plus de 130 pays. La cuisine, comme un lien indispensable entre les hommes ? Assurément…