Oyé, oyé, braves gens, Éric Dupond-Moretti lance sa grande refonte du système judiciaire. Huit mois après son arrivée place Vendôme, le garde des sceaux a présenté les grandes lignes d’un large projet de loi de réforme. Un bric à brac superficiel.
Une réforme pour restaurer la confiance en macronie ? Voilà la promesse faite par le garde des sceaux, Éric Dupond-Moretti. Dans un entretien accordé au journal Le Point, le ministre de la Justice a dévoilé les « grandes lignes » d’un large projet de loi de réforme de l’appareil judiciaire. Audiences filmées, suppression des crédits de réduction automatique de peine, encadrement des enquêtes préliminaires…. Bref, il s’agit de quelques-unes des propositions à mettre en place pour, dit-il, restaurer la confiance des Français dans une institution singulièrement décriée.
Une mission loin d’être une mince affaire au vu du chantier qui attend Dupond-Moretti. Si le ministre a précisé que le texte est encore susceptible de subir quelques modifications ou ajouts d’ici à son envoi dans quelques jours au Conseil d’État pour avis, puis sa présentation en Conseil des ministres mi-avril, une partie du texte reprend finalement les conclusions du rapport remis mi-février par Dominique Mattei, ancien bâtonnier de Marseille, concernant des sujets auxquels tient le garde des sceaux, notamment la protection du secret professionnel des avocats. Oui, il entend mieux le protéger en l’inscrivant dans la procédure pénale mais surtout en rendant impossible les perquisitions de cabinets, les écoutes téléphoniques et l’accès aux factures téléphoniques (« fadettes ») à condition que l’avocat concerné soit suspecté d’avoir commis une infraction. Difficile de ne pas y voir une touche très personnelle de la part du ministre mis en cause dans l’affaire dite « des écoutes ». Autres dispositions parfumées de procès Sarkozy : l’encadrement dans le temps des enquêtes préliminaires. Les magistrats-membres de la commission proposaient trois ans renouvelables une fois, le garde des sceaux, lui, a préféré suivre la position des membres-avocats et l’a limité à deux ans renouvelable une fois.
Grand défenseur de la cour d’assises, où il a arraché près de 140 acquittements en trente-six ans de carrière, l’ex-pénaliste annonce également vouloir réformer cette justice rendue par le peuple au nom du peuple français en augmentant notamment le nombre de jurés. Actuellement composée en première instance de trois magistrats professionnels et de six citoyens tirés au sort, Dupont-Moretti souhaite revenir à un système où une majorité de jurés sera à nouveau nécessaire pour entrer en voie de condamnation. De quoi faire grincer les dents des magistrats qui voient là une nouvelle preuve de défiance à leur égard. Un projet de loi agrémenté aussi de quelques mesurettes gadgets comme filmer les audiences à des prétendues fins pédagogiques, par exemple.
Une chose est certaine, l’ogre des prétoires n’a rien perdu de sa verve pour tenter « d’enrober au chocolat » un projet qui n’en est pas un. Et ce n’est pas une refonte du système judiciaire, ni l’expérience personnelle de l’ex-avocat, encore moins la modification de la procédure pénale qui changera en profondeur une institution déjà à l’agonie.