Depuis l’annonce de la candidature d’Éric Zemmour à la présidentielle, certains responsables politiques sont tentés par l’aventure aux côtés du candidat de droite. Ce qui provoque des tensions entre le Rassemblement national et Reconquête ! [Décryptage]
Marion Maréchal va-t-elle rejoindre Guillaume Peltier, Bruno Mégret et Gilbert Collard dans les rangs de Reconquête ! À quelques semaines de la convocation devant les urnes, la convergence vers le nouveau parti d’Éric Zemmour est indéniable et commence à inquiéter bon nombre de partisans dans le camp Le Pen.
Après avoir aligné – lors de son premier meeting à Villepinte – plusieurs personnalités de la droite nationale ou patriote comme Jean-Frédéric Poisson (Via, ex-parti Chrétien-Démocrate), Laurence Trochu (Mouvement Conservateur), Vijay Monany (Conseiller départemental de Seine Saint-Denis, ex- Les Républicains) et bien d’autres… Éric Zemmour n’a visiblement pas l’intention de s’arrêter là. Bruno Mégret a annoncé le weekend dernier qu’il rejoignait lui aussi le candidat, à l’instar de Bruno North, patron du petit mais influent Centre national des indépendants et paysans (CNIP), un temps allié de Nicolas Dupont-Aignan, puis de Marine Le Pen.
Parmi les derniers rapprochements officiels en date, ceux des deux députés européens du Rassemblement national (RN), l’avocat Gilbert Collard et le délégué du groupe Identité et Démocratie, Jérôme Rivière, lequel était LR avant de rejoindre Marine Le Pen.
Si les défections toujours vécus comme une véritable trahison – c’est là le jeu politique – le nombre total de changement d’écuries augmente. Une hémorragie que redoute la Présidente du Rassemblement national. En effet dans les rangs du RN des rumeurs vont bon train. La chasse au futur traître également. Ainsi comme souvent dans ce genre de situation, on frise la paranoïa. Et La chasse aux sorcières à davantage tendance à agir comme un repoussoir définitif plus qu’un ciment politique qui resoude un parti arrivé au second tour de la présidentielle en 2017.
La fin de semaine dernière a ainsi jeté l’opprobre sur plusieurs cadres susceptibles de faire le pas vers le candidat Zemmour. Nicolas Bay, passé par le Mouvement National Républicain (MNR) – le mouvement de Bruno Mégret après la scission de 1998 au Front National – serait, dit-on, tenté par l’aventure au côté de son ancien mentor. Des suspicions qui ont conduit Mme Le Pen à faire des déclarations :
[…] mais de manière générale, ceux qui veulent partir partent, mais ils partent maintenant. Parce que ce qui est insupportable c’est la taqiya, en quelques sortes, qu’ils reprochent eux-mêmes aux islamistes, voyez…
Un coup de pression dont l’effet pourrait potentiellement retarder les départs, mais pas de les empêcher. Pourtant, en politique, les mauvaises nouvelles sont souvent préférables quand elles tombent toutes au même moment afin de tirer un trait pour retrouver une dynamique. Et si Marine Le Pen n’apprécie guère ces récents départs, il y a une annonce qu’elle redoute encore davantage : le ralliement de sa nièce Marion Maréchal à Éric Zemmour. Pour l’heure l’ex-députée du Palais-Bourbon conserve une position neutre sans soutien officiel, ni à sa tante ni à l’ancien journaliste. Mais quelques petits mots pourrait bien changer la donne. En effet la Directrice de l’Institut de sciences sociales, économiques et politiques (ISSEP), bien que retirée du monde politique, a encore un large impact sur l’électorat conservateur. Par ailleurs, plusieurs de ses proches, mis sur le banc de touche par l’appareil du RN, ont d’ores et déjà rejoint les équipes de Reconquête ! Et si certains élus restent fidèle au parti comme le sénateur Stéphane Ravier – il pointe du doigt les possibles responsabilités du RN dans ces défections – d’autres préfèrent miser sur la dénonciation de traître en quête de mandat.
Un aveu de faiblesse, en guise de défense, qu’il conviendrait d’abandonner au plus vite sous peine de démontrer que l’adversaire a raison de ses choix. A plus forte raison que le départ de certains offre aussi l’occasion à d’autres visages d’émerger. Après le départ de Jérôme Rivière, la délégation du Parlement européen a, par exemple, été reprise par Hélène Laporte. On note également l’ampleur progressive prise par la députée européenne Virginie Joron, très engagée contre l’opacité des contrats de vaccin avec la Commission européenne, ainsi que la montée en puissance de Laure La Valette, porte-parole de Marine Le Pen, extrêmement présente dans les médias.
À trois mois du scrutin présidentiel, difficile donc de savoir si la guerre des positions est déjà terminée ou si les transferts vont encore se poursuivre. Mais pour l’heure le mercato en cours ne bouleverse pas vraiment les études de sondage puisque Marine Le Pen est qualifiée à égalité avec Valérie Pécresse (17 %), derrière Emmanuel Macron. Éric Zemmour serait quant à lui, toujours selon les instituts, crédité aux alentours de 13 points, le plus important étant de maintenir une dynamique. Cette configuration étonnante est bien différente de l’époque où les soutiens de Chirac fuyaient… vers Balladur. “[…] L’élection présidentielle, c’est la rencontre d’un homme et d’un pays, d’un homme et d’un peuple”, a dit François Bayrou (Meeting de Caen – 1er mars 2007). Qui de mieux qu’Éric Zemmour pour incarner cet homme providentiel ?