Samedi prochain, place de la République à Paris, ils seront là. Mais cette fois, ce ne seront pas des journalistes couvrant une manifestation pour d’autres, non ; ce sera pour eux-mêmes. Pour leurs morts. Pour leurs blessés. Et pour ceux qui, entre deux tirs, continuent de faire leur boulot à Gaza, au Liban et ailleurs, risquant la vie et —comble du cynisme — la réputation. Parce qu’apparemment, être journaliste en zone de conflit, ça ne suffit plus.
Dans son communiqué, la Fédération internationale des journalistes, appuyée par les syndicats français, égrène les chiffres avec une précision macabre. 143 journalistes abattus dans cette nouvelle escalade. La question se pose. Qui dérange à ce point ? L’information, on le sait, est une arme puissante. Mais de là à en faire un prétexte de meurtre ? On accuse sans preuves des journalistes de terrorisme, comme pour légitimer des frappes sur leur lieu de travail, et on se dit que tout ça passe trop bien. Après tout, qui va protester pour un journaliste ? Peut-être même que certains applaudissent discrètement.
Côté palestinien, le bilan officiel annoncé par le ministère de la Santé contrôlé par le Hamas monte à plus de 43 000 morts. Des civils, en grande majorité, mais pas que. Mais à en croire certains, c’est bien plus suspect d’oser documenter tout cela que d’y prendre part. De l’autre côté, on déplore plus de 1 200 victimes israéliennes, et chaque nouvelle est soigneusement transmise. On comprend alors pourquoi certains préféreraient que les journalistes ferment boutique.
Mais samedi, à Paris, ce seront des confrères et des défenseurs des droits de l’homme qui battront le pavé pour rappeler une évidence. On ne devrait pas risquer sa vie pour un micro, une caméra ou un carnet de notes. Quant aux accusations de terrorisme, elles en disent long sur l’envie de certains d’étouffer l’information là où elle dérange. Quant à la communauté internationale, elle observe, condamnation tiède à la main, laissant entendre qu’un journaliste, ça peut bien sauter avec le reste.