À quelques jours de la fin de la Coupe du Monde de football au Qatar, que nous souhaitons heureuse pour les Bleus, des suspicions de trafic d’influence impliquant une vice-présidente de l’institution secoue Bruxelles. [Éléments d’explication]

Une vice-présidente du Parlement européen inculpée et écrouée pour corruption et blanchiment d’argent ? Un nouveau scandale frappe Bruxelles à partir, cette fois, d’une enquête sur des soupçons de versement de pot de vin par l’état du Qatar. La police belge a effectué une perquisition au Parlement de Bruxelles lundi dernier. La 20e perquisition en quatre jours dans le cadre de cette enquête.
Lundi, toujours, une enquête interne au Parlement a été ouverte par la présidente de l’Assemblée continentale Roberta Metsola. Cette Maltaise de centre-droit a également annoncé une conférence extraordinaire du Conseil des présidents pour lancer une procédure liée à l’article 21, à savoir démettre un élu européen de son immunité. Le député Italien Pier Antonio Panzeri pourrait être visé. La vice-présidente grecque, Eva Kaili, elle, ne peut pas bénéficier de son immunité, car l’infraction qui lui est reprochée a été constatée en flagrant délit, c’est-à-dire la découverte de sacs de billets à son domicile.
Mme Kaili est donc au cœur de l’enquête. Elle est soupçonnée d’avoir été payée grassement par le Qatar pour défendre les intérêts de Doha devant les institutions européennes. Des sommes rondelettes auraient été saisies au cours des perquisitions. On parlerait d’un peu plus d’un demi-million d’euros (plus précisément 600.000, NDLR) en coupure de billets de 50 trouvés dans une chambre d’hôtel où résidait… Son papa ! Un aimable père de famille qui serait chargé d’une partie de ses petites affaires.
Les sommes devraient se situer autour de plusieurs millions d’euros, vu le niveau de vie des élus européens et de l’implication de plusieurs personnes qui nécessite de partager le magot. On ne s’étonne plus alors des propos très conciliant de cette vice-présidente en faveur du Qatar ; des déclarations qui prennent depuis quelques jours tous leurs sens :
[…] Aujourd’hui, la coupe du monde au Qatar est bien la preuve, que la diplomatie sportive peut aboutir à une transformation historique d’un pays, avec des réformes qui ont inspiré le monde arabe.
Parler de succès de la diplomatie du sport ne devrait pas consoler les familles des travailleurs morts sur les chantiers.
L’élue semble donc cernée de toutes parts. Lundi, l’autorité grecque de lutte contre le blanchiment d’argent annonçait geler l’entièreté de ses avoirs ; un gel qui s’étend aussi aux membres de sa famille proche, comme ses parents. Son avocat, lui, affirme qu’elle n’a reçu aucun pot-de-vin du Qatar.
Que des dirigeants européens soient corrompus par le Qatar. Rien d’étonnant à cela. Pourtant, les conditions de travail dans les stades et les mœurs et pratiques du pays sont en contradiction totale avec l’idéologie sermonnée à Bruxelles. Allez comprendre ?! Quiconque n’est dupe quand l’ancien président Nicolas Sarkozy défend le choix du Qatar pour cette compétition. Quant à la diplomatie du sport, il s’agit bien d’une vaste arnaque dont bénéficierait certains. Ici, le Qatar, et d’autre comme la Russie, évincée de la compétition après avoir obtenu l’organisation de Jeux olympiques, mais aussi une Coupe du Monde.
Au milieu de ce panier de crabes européens, la présidente de la commission Ursula von der Leyen était obligée de prendre position. Elle a pris la parole pour dire son « sentiment » :
[…] En effet, les allégations contre la vice-présidente du Parlement européen sont très sérieuses. Et nous savons qu’elles soulèvent de sérieuses préoccupations, car il s’agit de la perte de confiance des gens dans nos institutions européennes.
Nous exigeons les normes les plus élevées et nous exigeons l’honnêteté et l’intégrité au-delà de ces normes élevées.
Une perte de confiance dans les institutions ?
C’est un domaine dans lequel Mme von der Leyen ne devrait pas trop s’avancer. Elle-même est empêtrée jusqu’au coup dans de vilaines affaires notamment celles impliquant un contrat signé avec les laboratoires Pfizer. Ce « Qatargate », comme est surnommé cette affaire, à le mérite formidable, pour la présidente de la Commission, de dissiper les accusations dont elle-même fait l’objet. Une affaire en chassant une autre, le focus médiatique se déplace et laisse du répit à l’accusée précédente. En devenant présidente de la Commission européenne, elle avait déjà éclipsé un scandale en 2019. Celui de la centaine de millions d’euros qu’elle avait dilapidé en consultant et sous-traitant, alors qu’elle était alors ministre de la Défense d’Allemagne.