Pendant que la gauche brasse un air vicié, Macron oriente sa communication sur le parent pauvre du quinquennat : la sécurité. En déplacement lundi à Montpellier, le pensionnaire de l’Elysée s’est lancé dans la défense de son bilan régalien pour tenter de courtiser l’électorat de droite. [rires]
S’il y avait encore un doute, il a été levé ! Macron est bel et bien en campagne pour son hypothétique réélection en 2022. Largement critiqué pour avoir abandonné le régalien lors de son quinquennat, Jupiter tente de faire basculer la balance à seulement un an de la présidentielle. Lundi dernier, alors que ses déplacements en dehors de la capitale se font rares – qui plus est quand il s’agit de parler d’autre chose que du covid et de la campagne de vaccination – Macron s’est rendu à Montpellier (Hérault) pour causer sécurité. Un déplacement pour illustrer sur le terrain les résultats de la politique de sécurité du quotidien qui vise à donner aux forces de l’ordre (policiers et gendarmes) les moyens d’accomplir leur mission au service de la population Française.
Au programme de cette visite opportuniste : une discussion, franchement fade et sans saveur, avec les fonctionnaires de l’Hôtel de police, puis un passage au centre social de la Caisse d’Allocations Familiales (CAF) du quartier de La Mosson accompagné du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, afin de parler avec des acteurs de terrain engagés dans la lutte et la prévention de la délinquance. La Mosson, un quartier dit de reconquête républicaine ou plus de la moitié des habitants vivent sous le seuil de pauvreté, avec un taux de chômage atteignant 47 %. L’objectif est clair : rassurer les policiers sur une méthode qui tient en quelques points, notamment davantage de moyens avec 10.000 recrutements de policiers et gendarmes sur le quinquennat, soit la création de 3.500 postes en un an. Autant dire que l’engagement est totalement compromis ! A cela, il faut également compter sur une présence accrue, toujours sur le terrain, des actions visant à contrecarrer l’ensemble des faits ; des actes de terrorisme et ceux de petite délinquance, tout en faisant la promotion de la sécurité globale adoptée il y a quelques jours malgré les vives contestations. En guise de carottes pour appâter l’électorat, Macron a annoncé l’arrivée de policiers supplémentaires à Montpellier d’ici à la fin 2022. Une façon de ne pas trop prendre d’engagement de la part d’un président qui pourrait avoir quitté l’Élysée avant même la date fixée.
Quoi qu’il en soit ou quoi qu’il en coûte, c’est selon, cette timide offensive sur le régalien s’ajoute à celle lancée par un long entretien accordé au Figaro, dans lequel Macron affiche sa fermeté au moment même où la France doit faire face, selon lui, à une forte augmentation des violences sur les personnes. Ainsi le chef de l’État entend donner la priorité à la lutte contre les trafiquants de stupéfiants qui explosent et qui forment la matrice économique de la violence dans notre pays. Il appelle également de ses vœux à lancer un grand débat national – un de plus, qui ne servira à rien – sur la consommation de drogue et ses effets délétères, et à ne laisser aucun répit aux trafiquants de drogue. Un discours qui prend le revers de cette volonté farouche de légaliser la fumette (cannabis), très à la mode à gauche de l’échiquier politique.
Un discours de façade… mais pas un mot, en revanche, sur le système judiciaire qui, normalement, devrait aller de pair avec l’action policière. Hormis une demande de changement de loi sur l’affaire Sarah Halimi, Macron s’est montré beaucoup moins concerné par le naufrage judiciaire de la Cour d’assises des mineurs de Paris. A toutes fins utiles nous rappelons que dans la nuit de samedi à dimanche dernier, cette instance a condamné en appel cinq individus à des peines allant de 6 à 18 ans de réclusion, tous accusés d’avoir pris d’assaut et mis le feu à des voitures de police avec des fonctionnaires à bord le 8 octobre 2016 à Viry-Châtillon. Mais surtout la Cour d’assises a ordonné l’acquittement de huit autres prévenus. Un verdict qui a provoqué la colère des avocats et des victimes, on les comprend :
C’est un naufrage. Parce qu’au moment du verdict et malgré sa clémence pour l’immense majorité des accusés, le naturel a repris le dessus, une bagarre générale a éclaté, a déclaré M° Thibault de Montbrial, avocat d’une victime. Certains accusé qui pourtant venaient d’être acquittés, ont tenté manifestement, en tout cas de ce que j’ai vu, d’en agresser un autre et ont pris à partie également les gendarmes dans une scène de violence que je n’ai jamais vue en vingt-cinq ans d’exercice dans une Cour d’assises.
Evidemment cette décision est insupportable pour les policiers que nous représentons, souligne M° Laurent-Franck Lienard, avocat d’une victime. Ils étaient dans ces voitures, qui ont été brûlés et qui sont marqués à vie. Six ans, huit ans… on leur crache au visage. On les a brûlés une première fois et maintenant on leur crache au visage.
Tout cela a de quoi mettre à mal l’apparente détermination de Macron sur le volet sécuritaire en France. D’ailleurs, ses principaux concurrents sur le sujet ne se sont pas gênés pour le descendre en flèche. Le candidat déclaré à droite, Xavier Bertrand, a dénoncé l’échec total du chef de l’État en matière de sécurité, tandis que la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, lui a attribué le surnom de « président du chaos ». A un an de la présidentielle, Macron a encore du pain sur la planche pour tenter de se (re)créer une crédibilité sur le régalien. Alors que, selon une récente étude de l’Institut Elabe, les électeurs citent à égalité l’emploi, le pouvoir d’achat et la sécurité comme les thèmes qui compteront le plus dans leur choix à l’élection présidentielle en 2022, Macron à l’Elysée : est-ce bien fini ?