Après avoir pris de l’épaisseur lors de la campagne présidentielle aux États-Unis, le mouvement QAnon estampillé complotiste pourrait s’installer en France à un an de l’élection présidentielle.
La France sera-t-elle bientôt QAnonisée ? Alors que le mouvement qualifié de conspirationniste par les médias traditionnels s’est invité au cœur de l’élection présidentielle aux Etats-Unis certains craignent de le voir se diffuser massivement par-delà l’Atlantique. Il faut dire que les récits de QAnon ont déjà séduits de nombreux adeptes en Grande-Bretagne, en Allemagne, mais également en Italie ou en France.
Pour comprendre, le mystérieux Mr Q – à l’origine du mouvement – s’est fait connaître sur le net en 2017, précisément sur le forum 4chan. Il se présentait comme un informateur disposant de données secrètes directement issues de la Maison Blanche. Sous cette lettre Q désignant le plus haut niveau d’habilitation confidentiel aux États-Unis, le compte a donc commencé à diffuser des informations plus ou moins fondées pour dénoncer l’existence d’un gouvernement parallèle ; un état profond qui regrouperait des démocrates américains et des progressistes du monde entier, et dissimulerait un gigantesque réseau pédophile. Surréaliste ou inquiétant ? Chacun se forgera sa propre opinion, mais les médias progressistes, eux, ont bien compris qu’ils pouvaient se servir du mouvement pour en faire une arme politique, comme l’explique Gérald Olivier, spécialiste des États-Unis :
… moi qui connait bien le mouvement Républicain aux Etats-Unis, la première fois que j’ai entendu parler de QAnon c’était sur une chaîne de gauche, dans un journal télévisé de gauche avec des intervenants de gauche. Cette chose-là, QAnon, servirait à décrédibiliser une cause. Nous sommes ici dans la manipulation politique. Est-ce que cette manipulation peut traverser l’Atlantique ? Oui, mais il faudra bien avoir conscience que l’essence même du mouvement Trumpien, n’a rien à voir avec QAnon et ses dérivés.
Une manipulation dont le point d’orgue a eu lieu le 6 janvier dernier, lors des événements du Capitole. Alors que des manifestants – certains liés directement au mouvement QAnon – ont pénétré dans le bâtiment qui abrite le Congrès américain. Les médias et les démocrates ont immédiatement accusé Trump d’être à l’origine des violences, ce qui lui a valu un second procès en destitution pour incitation à l’insurrection.
En France, un procédé similaire a déjà été observé lors de la crise des gilets jaunes en mars 2019. Un groupe « gilet jaune versus pédocriminalité » s’appuyant sur des récits liés à QAnon est apparu sur Facebook. Une aubaine pour tenter de décrédibiliser toute forme de de revendication. Et à un an de la présidentielle, l’expérience QAnon aux Etats-Unis pourrait donner quelques idées aux adversaires de Le Pen : « … le contexte en France est un petit peu différent. Mais bien sûr, il peut y avoir la même rengaine. D’une certaine façon, elle a déjà eu lieu, c’est-à-dire qu’en France vous avez une diabolisation du vote de la droite, et je ne pense pas que les droites françaises aient réussi aujourd’hui à contrer ce problème. La gauche depuis François Mitterrand a parfaitement compté que le meilleur moyen pour élire systématiquement des gens de gauche ou de centre gauche était de diviser la droite en prétendant qu’une partie de cette droite n’est pas républicaine. Tant que la droite n’aura pas réussi à se réconcilier avec elle-même, elle ne pourra pas remporter une élection présidentielle (…) Et donc QAnon participe peut-être, si ce mouvement est manipulé et poussé, à une nouvelle diabolisation d’une certaine politique. La gauche va trouver un autre moyen de diaboliser la droite. Ce ne sera pas nouveau. »
En janvier déjà, la ministre déléguée à la citoyenneté, Marlène Schiappa, indiquait que le groupe QAnon et ses ramifications françaises étaient dans le viseur d’une mission d’inspection sur l’émergence de nouveaux groupes sectaires sur le territoire national. Il y a fort à parier que le parti présidentiel attribue l’émergence de ces groupes dit sectaires à certains partis politiques afin de les décrédibiliser pour 2022.