Les éboueurs de la ville de Paris ont voté, à l’unanimité, ce mardi 14 mars, la reconduction de la grève et du blocage de l’incinérateur d’Ivry-sur-Seine jusqu’au lundi 20 mars, a-t-on appris des syndicats.

Alors que les éboueurs de la ville de Paris se sont joints au mouvement de grève contre la réforme des retraites depuis le 7 mars dernier, les syndicats ont indiqué ce mardi que le blocage serait reconduit à minima jusqu’au lundi 20 mars. Lundi, pas moins de 5.600 tonnes de déchets restaient non ramassées, selon la mairie. Un volume qui augmente chaque jour et qui varie selon les secteurs, les plus touchés étant les dix arrondissements dont la collecte est assurée par des agents de la mairie.
Mais [même] dans ceux gérés par des prestataires privés, la collecte est perturbée puisque les trois usines d’incinération d’Ivry-sur-Seine, d’Issy-les-Moulineaux et de Saint-Ouen, aux mains du Syctom, l’agence métropolitaine des déchets ménagers, sont bloquées.
Pénibilité, augmentation de salaire et retraite
Ce lundi, dès 6h du matin, sous la bruine et dans les relents des déchets, une centaine de manifestants ont planté leurs drapeaux FO et CGT devant le site d’Issy-les-Moulineaux, qui accueille en temps normal 1.600 tonnes de déchets par jour.
«On est dehors tous les jours, on travaille qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’il vente, et quand on est derrière la benne, on respire des choses volatiles, on a beaucoup de maladies professionnelles, de cancers, le travail est pénible», a décrit Nabil, un éboueur de 44 ans.
Murielle Gaeremynck, une femme menue de 56 ans dont 20 comme éboueuse, a quant à elle énuméré les chutes de la marche du camion, les tendinites à répétition des balayeurs ou, comme elle, des conducteurs de petits engins «aux suspensions pourries». A la retraite, «je sais que je vivrai pauvre», avec une pension de 1.200 euros grand maximum, s’est-elle désolée.
La CGT a également rappelé que les éboueurs et les conducteurs peuvent pour l’heure prétendre à la retraite à 57 ans sans bonification, un âge repoussé à 59 ans en cas d’adoption de la réforme. C’est aussi pour une revalorisation indiciaire qu’ils sont mobilisés, ont expliqué les grévistes sur place. Leur déroulement de carrière se négocie directement avec la mairie.
Ils ont trouvé de l’argent pour nous envoyer en première ligne pendant le Covid, qu’ils nous disent pas aujourd’hui chez Hildago qu’ils n’ont pas d’argent
commente Nabil.
Les oppositions politique se multiplient
De son côté, la maire PS de Paris, Anne Hidalgo, se retrouve dans une situation inconfortable, elle qui a décrété la mairie «solidaire avec le mouvement social».
«Ce n’est pas une situation totalement surprenante dès lors que la maire de Paris avait encouragé les agents à faire grève», a taclé sur France Inter le ministre des Comptes publics Gabriel Attal, citant les réquisitions d’agents parmi les mesures possibles à prendre.
L’opposante LR Rachida Dati réclame quant à elle «la mise en place d’un service minimum pour le ramassage des ordures» et, dans l’immédiat, «de faire appel à des entreprises d’insertion».
Service minimum ou prestations, «c’est interdit sur le plan juridique», a répondu le premier adjoint (PS) Emmanuel Grégoire pour qui les réquisitions sont «une initiative et compétence légale qui relèvent de l’Etat». «C’est une situation nationale à laquelle d’autres villes sont confrontées», souligne le bras droit d’Anne Hidalgo en citant Nantes, Antibes, Saint-Brieuc ou Le Havre, ville d’Edouard Philippe, l’ancien Premier ministre d’Emmanuel Macron.
Hôtels frappés de plein fouet
Les hôtels et restaurants font partie des établissements qui subissent de plein fouet les conséquences de cette situation. Entre insalubrité, mauvaises odeurs et rats, les habitants commencent à perdre patience.
Certaines professions sont plus touchées par cette grève. En effet, les ordures qui s’amoncellent devant les hôtels, font une très mauvaise publicité pour les établissements. De nombreux touristes se plaignent, d’autres décident de ne pas y séjourner. En réaction, le personnel hôtelier s’organise.
«J’ai honte ! Ce n’est pas l’image que je veux renvoyer, ni de Paris, ni de l’hôtel dans lequel je travaille», déplore un gérant. À cela s’ajoute les grèves dans les transports qui handicape beaucoup d’employés. «C’est très pénalisant au niveau de l’activité économique. C’est très dur » regrette encore l’hôtelier. Pour faire face aux annulations en cascade, le professionnel envisage de casser les prix, lui qui a déjà baissé ses prix de 20%.