Décidé en juillet 2020, le plan de relance européen n’est toujours pas entré en vigueur neuf mois après. Il risque de n’être qu’un coup d’épée dans l’eau et servir au mieux à accompagner une reprise économique molle.
Décidé en juillet 2020, le plan de relance européen n’est toujours pas entré en vigueur neuf mois après. On a tendance à l’oublier, mais ce plan de relance économique avait été annoncé en juillet 2020 à grand renfort de tambours et trompettes. L’Europe avait mis sur la table quelques 750 milliards d’euros (soit 5% du PIB européen) afin de soutenir l’activité économique sur un vieux continent durement frappé par le covid. Le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, annonçait à qui voulait l’entendre l’arrivée prochaine de la cavalerie européenne. Neuf mois plus tard, la cavalerie se fait toujours attendre… Ce plan avait pourtant été ratifié en décembre 2020 par le conseil européen des chefs d’Etats et de gouvernements.
Comment expliquer un tel retard à l’allumage ?
Il y a plusieurs raisons qui expliquent cette situation. La première est que, s’agissant d’une décision du conseil européen, ce plan doit être ratifié non seulement par les instances européennes (commission, parlement européen) mais aussi par les parlements des vingt-sept pays membres de l’Union. Or, à ce jour, seuls dix-sept d’entre eux ont officiellement accepté ce plan. Aux lenteurs des calendriers nationaux s’ajoutent les réticences politiques de certains pays concernant tel ou tel aspect contenu dans ce plan. Ainsi la Hongrie et la Pologne ont-elles contesté le principe selon lequel l’octroi des aides européennes devrait être soumis au respect de l’Etat de droit tel qu’on le conçoit à Bruxelles. D’autres Etats s’estiment déjà très endettés et rechignent à mettre le doigt dans l’engrenage du plan de relance européen. Bref, la cacophonie règne et la confiance n’est pas toujours au rendez-vous entre Bruxelles et certains Etats membres qui anticipent déjà le retour aux règles de rigueur budgétaire, sitôt la pandémie terminée.
Au mieux, ce plan entrera en application à l’été prochain à moins que ce ne soit à l’automne ou à l’hiver. Le temps que ses premiers effets se fassent sentir sur la conjoncture économique et nous serons arrivés vers le milieu de l’année 2022. Entre temps, la Chine et les pays d’Asie du Sud-Est auront connu une reprise vigoureuse et les Etats-Unis, dopés par le plan de relance du président Biden, leur auront emboité le pas. Par ailleurs, tout dépendra aussi de l’évolution de la campagne de vaccination et de la capacité des différents pays européens à juguler l’épidémie. Dans le cas contraire, l’écart risque de se creuser davantage encore entre, d’une part, l’Europe et, d’autre part, l’Asie et les Etats-Unis. Ce plan, qui comporte 312 milliards d’euros de subventions et 360 milliards de prêts consentis aux Etats par l’Union Européenne, poursuit un double objectif. En premier lieu, il vise à éviter l’entrée de l’économie européenne en déflation. En second lieu, il ambitionne de hâter la transition écologique et numérique de l’économie européenne. Bruxelles met l’accent sur l’accélération de la transition écologique et entend contrôler étroitement l’usage qui sera fait par chaque pays des fonds européens. C’est pour cette raison que Bruxelles exige que chaque pays lui soumette un plan de relance détaillé afin de s’assurer de l’affectation future des fonds alloués au niveau de chaque Etat membre. Si l’on considère uniquement les fonds affectés à la relance de l’activité, ceux-ci n’auront selon toute vraisemblance qu’un impact limité. Au mieux, le plan de relance européen servira plutôt à accompagner qu’à susciter une reprise de la croissance économique. Celle-ci s’annonce d’ailleurs molle et sujette aux aléas de la sortie de la pandémie. Ce qui apparaît d’ores et déjà, c’est que l’Europe est menacée de déclassement dans le monde de l’après Covid-19, dominé par la montée en puissance de la Chine et la pugnacité des Etats-Unis.