La candidate unique de la droite parlementaire bénéficie d’une étonnante et curieuse dynamique sondagière. Elle entend bien se placer en seul recours possible pour prendre la place de Macron. Est-ce bien le cas ?
Valérie Pécresse qualifiée au second tour de la présidentielle pour contrer Emmanuel Macron ? Les Républicains (LR) en rêvent et un sondage accrédite cette hypothèse. D’ailleurs la dernière étude PrésiTrack d’Opinion Way pour le journal Les Echos présente la candidate LR à 17 % d’intentions de vote, loin derrière le président sortant à 24, mais à un seul point devant Marine Le Pen donnée à 16 %. Eric Zemmour, lui, est positionné à 12 points derrière la candidature des gauches. Ecologistes et Insoumis sont donnés en dessous des 10 %, sans surprise.
Tout porte à croire que la « guerre des Droites » sera le prochain feuilleton de cette élection. Qui décrochera son billet pour le second tour face à l’hypothétique Macron ? Pour faire valoir ses chances, Valérie Pécresse possède un certains nombres d’atouts. Comme elle le répète souvent, elle serait la mieux placée pour déstabiliser et battre Macron au second tour, ce qui semble assez juste si l’on considère qu’un front républicain se dressera face à la candidature Le Pen, comme face à la candidature Zemmour. Mais alors comment va-t-elle pouvoir l’emporter là où François Fillon a échoué ?
Il y a certes moins d’enthousiasme dans son propre camp que pour celui de François Fillon qui avait remporté en 2017 une primaire ouverte avec près de 3 millions de voix. Mais cette fois la candidate de la droite parlementaire part avec le soutien de toute sa famille politique. Qu’il s’agisse de ses anciens adversaires Eric Ciotti, Michel Barnier ou encore Xavier Bertrand, tous se sont sagement rangés derrière elle. C’est aussi le cas du président de la région Auvergne Rhône-Alpes, réputé plus « droitier » et ex-patron des Républicains, Laurent Wauquiez, mais aussi celui du chef de file LR au Sénat Bruno Retailleau. Du côté des députés européens, Nadine Morano qui ne cache pas sa sympathie personnelle envers Eric Zemmour est néanmoins derrière la candidate, tout comme François-Xavier Bellamy. A ceux-là s’ajoute l’ancien président des Maires de France (AMF), François Baroin, à qui elle a rendu visite à Troyes. En matière de réseau ces soutiens ne sont pas sans intérêt. Même Rachida Dati lui a apporté son appui tout en émettant des réserves sur sa ligne extrémiste en matière de vaccination.
L’unité comme atout majeur donc, mais nous savons Ô combien que la route vers l’Elysée est parfois semée d’embuches. En ce sens, Valérie Pécresse n’est pas à l’abri d’un risque de scandale dont a fait les frais François Fillon il y a cinq ans. Pour sa part, c’est le spectre de l’affaire dite d’Alsthom avec son époux, Jérôme Pécresse, President & CEO de GE Renewable Energy (ex-Alsthom) qui pèse sur la candidature LR. En effet, certains accusent le couple de s’être indûment enrichis à la vente de la multinationale française. Si ce dossier pourrait être utilisé par ses détracteurs, le risque demeure toutefois limité puisqu’il pourrait aussi éclabousser devinez qui ? Emmanuel Macron. La candidate semble donc mieux armée contre le scandale que son prédécesseur. Déjà accusée d’avoir eu recours à des électeurs étrangers pour remporter la primaire, elle n’a pas sourcillé. Être crapuleux en politique peut apporter ce petit supplément d’âme qui offre l’opportunité d’être un jour Président.
Pécresse-Macron, un couple politique ?
Il se dit en certains lieux que ce couple incarne l’assurance de garder les pleins pouvoirs en France. En 2022, les législatives vont être décorrélées des présidentielles. Elles auront lieu deux mois plus tard. Aussi avec le morcellement actuel des Français, il sera difficile pour Macron – potentiellement élu – d’avoir une majorité au parlement. Mais LREM et LR, à deux, et quelles que soient les configurations, seraient quasiment assurés d’avoir la majorité à l’Assemblée nationale. Selon plusieurs hypothèses les chances sont mêmes grandes pour que Macron, Pécresse et Edouard Philippe se partagent les postes de Président, Premier ministre et Président de l’Assemblée nationale. Tout cela se faisant, évidemment, au nom d’une Union nationale contre les « lépreux », contre les complotistes vicieux et autres extrêmes, au nom d’une République bananière et ses valeurs universalistes, défendues par le barnum habituel des catins donneuses de leçons.
Mais aujourd’hui, coincée entre le centre macroniste et les candidatures Le Pen / Zemmour, Mme Pécresse doit vendre plus d’arguments que sa simple capacité à remporter un hypothétique second tour. Il s’agira de déborder le président sur sa droite mais aussi sur le sujet des réformes. C’est le ton qu’elle a semblé vouloir emprunter jeudi dernier lors de son passage à TF1, seulement 24 heures après l’entretien soporifique du président sortant. Si elle y a critiqué l’absence de réformes de Macron, notamment sur les retraites, elle s’est aussi placée en ennemie de la bureaucratie. Ce qui ne manque pas de piquant pour cette énarque qui n’a jamais travaillé dans le privé !
Faute de susciter un enthousiasme populaire voire « militant » au sein de ses troupes, Valérie Pécresse dispose donc de quelques atouts dans sa manche. Bénéficiant de l’unité des Républicains et des relais régionaux que ceux-là impliquent, elle devra se montrer singulièrement habile pour ne pas froisser son hémisphère droit et son aile centriste. Elle devra surtout tenir bon en cas de coup de mou dans les sondages. Car l’embellie actuelle dont elle est l’objet semble être liée à la nouveauté de sa candidature et surtout à l’absence de candidature de Macron qu’à son projet politique. Un projet sans consistance pour le moment, mais peut-être est-ce voulu.