RUSSIE I A 70 ans, Irina Semionova vend ses conserves de tomates et aubergines à la sortie du métro de Saint-Saint-Pétersbourg : comme de nombreux Russes, cette retraitée doit recourir à la débrouille vue la faiblesse de sa retraite.

Une passante à Saint-Pétersbourg devant un panneau affichant une photographie du président russe Vladimir Poutine et le slogan « Un président fort, une Russie forte« , le 12 janvier 2018 I AFP/Archives / Olga MALTSEVA
Sur une pension mensuelle de 12.000 roubles (environ €170), il ne reste plus que 4.000 roubles, à peine plus de €50, pour vivre un fois payés factures et médicaments.
Peut-on vivre avec 4.000 roubles surtout dans une ville comme Saint-Pétersbourg, où tout est cher? se demande-t-elle.
Elle trouve son salut dans sa maison de campagne en périphérie de l’ancienne capitale impériale, dans le nord-ouest du pays :
J’y vais en été, j’ai un potager et je vends ce que je cultive, cela m’aide à survivre.
Lors de ses deux premiers mandats (2000-2008), le président Vladimir Poutine a redressé une économie exsangue après le marasme qui avait suivi la chute de l’URSS, permettant une progression du niveau de vie. Mais depuis son retour au Kremlin en 2012, après quatre ans au poste de Premier ministre, la machine s’est grippée. La Russie vient de traverser quatre années de baisse du pouvoir d’achat due à la flambée des prix causée entre 2014 et 2016 par la chute des cours du pétrole et les sanctions occidentales liées à la crise ukrainienne. Si le taux de pauvreté a fondu de 29% de la population en 2000 à 10,7% en 2012 selon l’agence de statistiques russe Rosstat, il est remonté à 13,4% en 2016. Le nombre de Russes jugés par la Banque mondiale en position de sécurité économique, c’est à dire à l’abri d’une chute dans la pauvreté, représente désormais moins de la moitié de la population (46,3%), dix points de moins qu’en 2014. La situation est particulièrement critique en province où, loin de la vitrine rutilante que constitue Moscou, salaires et retraites permettent à peine de subsister.
Les prix sont dingues, s’insurge Viatcheslav, mécanicien à la retraite de la région de Kalouga (200 km au sud-ouest de Moscou). Je ne peux rien acheter.
Dans un village voisin, Tatiana Kouznetsova, 47 ans, sait déjà qu’elle touchera moins de €100 de retraite alors qu’elle trime depuis l’enfance. Pas de quoi remplacer sa voiture bringuebalante, regrette cette employée d’une usine de transformation du poisson. Selon une étude de la banque Crédit Suisse, les 10% de plus riches détiennent 77% des richesses, plaçant la Russie au même niveau que les Etats-Unis -champions des inégalités parmi les pays développés.
Entre 2000 et 2013 le gouvernement n’a pas eu à trop se préoccuper de l’économie, parce que la hausse de la richesse pétrolière ainsi que la forte croissance des revenus et du crédit ont stimulé l’économie sans beaucoup d’intervention gouvernementale, estime Chris Weafer, fondateur de la société de conseil Macro Advisory.