Plusieurs organismes regroupant des gérants de salles, producteurs et distributeurs s’opposent à la mise en place des contrôles à partir du 21 juillet.
Les salles de cinéma sont-elles sûres devant l’explosion de cas de covid due à l’implantation du variant delta en France ? Pas assez selon certains épidémiologistes et, surtout, selon le gouvernement qui veut renforcer la protection des spectateurs. Emmanuel Macron a annoncé que les lieux culturels, et donc les salles obscures, devront contrôler leur public et ne laisser entrer, à partir du 21 juillet, que les personnes disposant d’un pass sanitaire (vaccination complète ou test négatif). La décision ulcère une partie des professionnels des cinémas, exemptés jusqu’à présent de tels contrôles, à la différence des festivals et des salles de concerts par exemple.
Dans un communiqué commun à plusieurs de ces organismes*, les signataires annoncent donc saisir le Conseil d’État pour contester ce qu’ils jugent être une «discrimination». Ils demandent «au juge de reporter la mise en œuvre du pass sanitaire en alignant à minima la date et les modalités de cette mesure pour tous les secteurs accueillant du public». Soit un report de dix jours, du 21 juillet à début août. «Cette situation représente une rupture d’égalité manifeste vis-à-vis des autres secteurs comme les restaurants, les commerces ou les transports», estiment-ils en se plaignant du «délai extrêmement bref qui a été alloué aux cinémas dans la mise en place du pass sanitaire».
La saisine intervient alors que, dès le lendemain des annonces de Macron, le gouvernement avait déjà ménagé plusieurs assouplissements, dont un premier concernant les adolescents, pour la plus grande joie des professionnels du secteur. En dépit de l’explosion des cas de contaminations dans cette tranche d’âge (+80% la semaine dernière pour les 10-19 ans), Olivier Veran avait expliqué que les enfants de 12 à 17 ans seraient exemptés de présenter un pass sanitaire jusqu’au 30 août dans les endroits où il n’était pas demandé jusqu’à présent. Pour le secteur culturel, il s’agit principalement des cinémas, premier loisir des Français. Les cinémas ont pu rouvrir dès le 19 mai, d’abord avec une jauge restreinte, puis sans jauge depuis le 30 juin. Le port du masque y reste obligatoire avant, après et pendant toute la séance, même si les gérants de salles peinent à faire respecter cette obligation une fois les lumières éteintes. Certains estiment d’ailleurs que c’est au public de faire la loi dans la salle, «comme les spectateurs le font lorsqu’il y a des bavards pendant les films», selon un représentant du secteur.
Le port du masque est pourtant considéré comme une condition sine qua non à la présence du public dans un lieu clos selon la plupart des épidémiologistes. A fortiori au moment d’une reprise des contaminations. Antoine Flahault, professeur de santé publique à l’université de Genève, juge par exemple qu’en raison de la transmission du virus par aérosols, particules qui peuvent rester en suspension dans l’air plusieurs heures et franchir des distances plus importantes, il faudrait s’assurer de la bonne ventilation des salles de cinémas et pouvoir équiper ces lieux de capteurs de CO2, qui offrent un indicateur du renouvellement de l’air. Quitte à ménager des entractes quand les voyants virent au rouge.
* Association française des cinémas art et essai, Fédération nationale des cinémas, Association des producteurs indépendants, Association du cinéma indépendant, Union des producteurs de cinéma, Syndicat des producteurs indépendants, Fédération nationale des éditeurs de films, Distributeurs indépendants réunis européens, Fesac.