Producteur et brillant co-scénariste d’Athena, Elias Belkeddar s’inscrit avec « Omar la fraise » dans le sillon des films issus du collectif Kourtrajmé (fondé par Romain Gavras et Kim Chapiron). L’homme partage avec ces derniers le goût de l’épate, mais aussi l’intention d’apporter une visibilité accrue à la jeunesse des banlieues, longtemps reléguée aux marges de l’industrie du cinéma français.

Le cinéma a le pouvoir de captiver les spectateurs et de les transporter dans des mondes imaginaires. « Omar la fraise », l’un des films les plus attendus de l’année, présenté en Séance de minuit au Festival de Cannes il y a quelques jours, offre une expérience cinématographique unique qui mérite d’être vue.
Ce premier film suscite la curiosité par sa manière de documenter les cités vétustes d’Alger mais aussi par la trajectoire attendue de son personnage principal. Légende du grand banditisme contraint de se mettre au vert, Omar (Reda Kateb) part se cacher en Algérie aux côtés de son mentor Roger (Benoît Magimel), qui lui conseille de devenir l’associé d’un dealer reconverti dans le business légal des biscuits orientaux.
Au lieu de se contenter d’une banale histoire de rédemption, le premier tiers du récit a le mérite de jouer sur deux tableaux : le film se présente comme une « lettre d’amour » aux quartiers populaires de la capitale algérienne, tout en s’inscrivant dans un lignée franchouille des comédies mafieuses parodiques, dont Les Tontons flingueurs reste encore aujourd’hui un modèle vivant. D’où le mélange de dérision et d’excès caractérisant à la fois les personnages et la mise en scène qui ne lésine pas sur les effets clinquants et les clins d’œil ironiques.
Véritable cœur battant du film, Magimel parvient à insuffler des ruptures de ton brisant la monotonie des séquences, notamment lorsqu’il se met à parler maghrébin, à rapper ou à danser en djellaba sur le toit de sa villa.
Omar se voit ainsi offrir le beau rôle lorsqu’il devient, sans raison apparente, le mentor de petites frappes issues de la cité « Climats de France », n’hésitant pas à leur faire la leçon à cause de leur manque de « professionnalisme ». Cette manière de rejouer inconsciemment une logique de domination coloniale (Omar est né en France et dit ne pas avoir l’Algérie dans le sang) finit par faire de ces jeunes délinquants de simples « ensauvagés ». Renforcée par la frénésie des mouvements de caméra et les ralentis, le sadisme gratuit dont ils font preuve lors de leurs exactions – ils découpent une oreille à la pince Monseigneur ou grillent le visage d’un cuisinier sur une plaque brûlante – souligne combien ces adolescents doivent être pris en main par leur bon maître.
Et lorsqu’Omar, en bon patriarche, finit par « adopter » toute cette tribu lors d’une scène d’un sentimentalisme presque gênant, le film finit par révéler du « vrai ».
« Omar la fraise » parle de la jeunesse algérienne, de ses rêves, de ses aspirations et de ses difficultés. Le film offre une vision authentique de la vie à Alger, explorant ainsi les thèmes de l’amitié, de l’identité une bonne dose d’humour sauce algérienne, créant ainsi une connexion émotionnelle puissante entre les personnages et le spectateur. Coup de cœur de la rédaction.