L’Iran a franchi la limite imposée à ses réserves d’uranium faiblement enrichi par l’accord de 2015 sur son programme nucléaire, prenant le risque d’être déclaré pour la première fois en faute sur ses engagements en la matière.

Le ministre des Affaires Etrangères iranien Mohammad Javad Zarif le 16 mai 2019 à Tokyo au Japon I AFP/Archives / Kazuhiro NOGI
L’Iran a dépassé la limite des 300 kilogrammes d’uranium faiblement enrichi, a annoncé le ministre des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif à l’agence semi-officielle Isna.
Cette annonce iranienne, jugée profondément inquiétante par la Grande-Bretagne, survient sur fond de tensions exacerbées avec les Etats-Unis de Donald Trump, faisant craindre un embrasement guerrier dans la région stratégique du Golfe. La crise entre les deux ennemis a connu un pic le 20 juin dernier après que l’Iran eut abattu un drone américain. Selon Téhéran, l’appareil avait violé l’espace aérien iranien, ce qu’a démenti Washington. Chargée de vérifier que l’Iran s’acquitte de ses engagements pris vis-à-vis de la communauté internationale en juillet 2015 à Vienne, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a confirmé que l’Iran avait dépassé la limite imposée par le pacte.
L’Agence a vérifié au 1er juillet que le stock total d’uranium enrichi a dépassé les 300 kilos, a indiqué un porte-parole de l’agence onusienne.
Ni l’AIEA, ni M. Zarif n’ont précisé le niveau actuel des réserves d’uranium enrichi iraniennes, mais un diplomate en poste à Vienne a indiqué à l’AFP que celles-ci avaient été mesuré en excès de deux kilogrammes.
Nucléaire: « Ne pas dramatiser »
La question est désormais de savoir quelles seront les conséquence de ce dépassement de l’accord. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu avait réclamé le 17 juin l’application immédiate du mécanisme de sanctions (snapback sanctions) inscrit dans l’accord de 2015 au moindre écart de la République islamique. Mais cette question est d’abord du ressort des autres Etats encore parties à l’accord de Vienne: Allemagne, Chine, France, Grande-Bretagne et Russie. Les Européens, et notamment la France, ont exhorté l’Iran ces dernières semaines à ne pas commettre l’erreur de se retrouver en situation de violation de l’accord sur le nucléaire. Téhéran affirme agir dans le cadre de ce pacte, invoquant deux articles permettant à une partie de s’affranchir temporairement de certains de ses engagements si elle estime qu’une autre ne tient pas les siens. Le dépassement de la limite suscite le regret, mais il ne faut pas dramatiser, a réagi Moscou par la voix du vice-ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Riabkov, qui a appelé les Européens à ne pas envenimer la situation et Téhéran à se conduire de manière responsable. La réaction de Londres a été plus vigoureuse, jugeant l’annonce profondément inquiétante:
J’exhorte l’Iran à ne plus s’éloigner de (l’accord) et à se conformer de nouveau à ses obligations, a ajouté sur Twitter Jeremy Hunt.
Pour autant, Mohammad Javad Zarif a redit la détermination de son pays à continuer de se désengager progressivement de l’accord tant qu’il n’obtient pas les garanties qu’il demande aux autres parties pour contrer les effets de la décision américain de sortir unilatéralement de ce pacte. Le président américain Donald Trump a en effet décidé en mai 2018 de dénoncer l’accord et de réimposer des sanctions contre l’Iran. En riposte, Téhéran a annoncé le 8 mai qu’il ne se sentait plus tenu par deux seuils fixés par l’accord: celui limitant son stock d’uranium faiblement enrichi (300 kilos), et celui imposé à ses réserves d’eau lourde (130 tonnes). Téhéran menace par ailleurs de reprendre, à partir du 7 juillet, des activités d’enrichissement d’uranium à un taux supérieur au degré maximal fixé par l’accord (3,67%) et de relancer son projet de construction d’un réacteur à eau lourde à Arak (centre).
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