Dernière semaine, dernière ligne droite… Le Pen et Macron se livrent l’ultime bataille d’un feuilleton présidentiel raté. Un scrutin qui sera sans doute plus serré qu’en 2017, avec le risque pour le président sortant de voir ce second tour virer au cauchemar.
C’est à ce second tour qu’il songeait, mais aujourd’hui Le Candidat. est tout de même inquiet. Emmanuel Macron, stratège électoral, se rêvait dans une seconde partie à l’image de celle de 2017. Pour l’heure c’est le cas, mais les chiffres ne sont plus les mêmes. Et pour cause les cinq années écoulées sont un véritable fardeau pour le locataire de l’Élysée: gilets jaune, réforme des retraites, gestion sécuritaire de la crise sanitaire, le tout ponctué de vilaines et sales affaires, de Benalla à McKinsey en passant par ses sorties médiatiques méprisantes (mais affectueuses, NdlR) à l’encontre des Français.
Un président sortant face à des détracteurs furieux, mais aussi des soutiens certains de leurs faits et de la justesse des décisions prises pendant cinq ans. Une polarisation autour du président et une hostilité à son égard qui est telle que nombre d’électeurs de gauche – d’ordinaire sensible au fameux front républicain – renonceraient à voter pour éliminer Marine Le Pen. Certains envisagent même de voter pour elle.
Vingt ans après les manifestations d’entre-deux-tours de 2002 qui voyaient s’affronter Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen, les manifestations sont moins garnis et témoignent d’une lassitude vis-à-vis d’un antifascisme électoral presque ringard.
Les études d’opinion n’ont jamais crédité Marine Le Pen aussi haut. Elle oscillerait entre 44,5 et 47 % des voix. De quoi inquiéter dans les rangs de la majorité. L’ancien Premier ministre, Édouard Philippe, qui se place déjà pour 2027, s’en est pris à ceux qui renverraient dos à dos Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Et pourtant, ce n’est pas une position empruntée par beaucoup, mais plutôt à la marche par quelques élus Les Républicains ou La France Insoumise qui souhaitent s’encanailler en votant « blanc ».
La stratégie de diabolisation contre le Rassemblement national joue à plein régime dans les rangs d’En Marche ! tandis que du côté de l’équipe de la candidate, on continue d’arrondir les angles en revenant notamment sur la position bancal concernant l’interdiction du port du voile dans l’espace public du voile ou en donnant ici et là des gages concernant notamment la (re)instauration de la peine de mort. Une tentative de normalisation qui, pour l’instant, semble plutôt porter ses fruits.
L’emporter serait néanmoins une surprise exceptionnelle. Des renversements ne se font pas que dans les urnes, il se prépare surtout en amont à travers la culture, l’éducation, les médias… Or le Front national devenu Rassemblement national n’a pas percé dans l’environnement métapolitique. Et si ses idées et la personnalité de Marine Le Pen ont été gommés au profit d’une image neutre, cela semble beaucoup trop juste pour prendre le pouvoir. Il ne s’agit pas là de dire ce que l’on veut entendre mais ce qui est.
Il subsiste toutefois une dernière carte que les soutiens de Marine Le Pen, mais aussi les détracteurs du président sortant vont jouer. Si le vote des plus de 65 ans est acquis au Candidat. Marine Le Pen, elle, dispose d’une marge de progression majeure dans certains segments. En banlieue notamment, ce qui n’est pas sans poser une certaine difficulté, puisqu’une partie de son électorat risque de mal percevoir des clins d’œil à ses électeurs largement issus de l’immigration. Les déclarations en faveur de la création d’un État palestinien qui partagerait Jérusalem comme capitale avec l’Etat hébreux peuvent d’ailleurs s’inscrire dans cette idée et semble assez bien vue en ce qu’elle permet de défendre une position raisonnable et se couper des extrémistes anti-arabe. L’électorat des 18-25 ans, lui, concentre 41 % des abstentionnistes.
Pour l’heure, Le Pen semble bénéficier d’un effet favorable de la référendumisation du scrutin. En faisant de cette élection un référendum « Pour ou Contre » Macron, des personnalités loin de Le Pen lui tendent un marche-pied. Mais attention néanmoins aux excès d’enthousiasme. En effet, l’élection de Le Pen est numériquement improbable car culturellement non admise par une majorité. Il faut aussi tenir compte des risques qu’implique le débat de ce mercredi soir avec une donnée majeure à observer: à mesure que Marine Le Pen grimpe dans cette dernière ligne droite, la mobilisation dite du barrage Républicain sera d’autant plus massive et Macron n’a pas utilisé toutes ses cartouches, notamment celles mémorielles.
En jouant sur la peur et grâce à des sondages probablement publiés à la hausse, la masse média pourra(it) faire bénéficier d’une mobilisation d’ampleur en faveur du président sortant. Un mouvement analogue a pu être observé lors des élections régionales en Provence-Alpes-Côte d’Azur durant lesquelles le RN était donné gagnant, mais a fini sous la barre des 43 points.