Virginie Efira en belle-mère dépassée, l’admiration d’un grand amoureux de Goya, un film mordant sur la maternité non désirée… Que faut-il voir cette semaine ?
Les Enfants des autres. Drame de Rebecca Zlotowski (1h43) – Rachel a la quarantaine, tombe amoureuse d’un père séparé, Ali, solide, protecteur, attachant. Il ne faudrait pas oublier la délicieuse Leila, 4 ans, qui fait partie du lot. Éternelle célibataire, cette prof de lettres découvre le charme et les corvées d’une maternité de substitution. Elle n’a pas eu d’enfant et elle commence à se poser des questions. Son gynécologue ne voudrait pas la brusquer, mais l’horloge biologique tourne. Alors Virginie Efira se perd dans les bras de Roschdy Zem, qui est designer automobile. L’homme compartimente sa vie. Il y a son ex, Chiara Mastroianni, fragile comme un soupir, qui comprend la situation à demi-mot. La nouvelle élue se charge des devoirs quotidiens, aller chercher la gamine à son cours de judo, préparer le goûter. Le désir d’être enfin enceinte la taraude. Leila l’aime bien. Rachel préférerait qu’elle l’aime tout court. Parfois, la fillette réclame sa maman. Rachel est perdue. Des liens se tissent. Ils risquent d’être éphémères. Ali a l’air déchiré. Il avance à pas feutrés. L’anniversaire de Leila se passera dans la belle-famille. Rachel est priée de rester de son côté. Elle tique un brin. Drôle de position que la sienne. Mère sans l’être à 100 %, toujours comparée au passé, n’ayant pas les codes, apprenant sur le tas. Si vous croyez que c’est facile. Virginie Efira renouvelle avec grâce et profondeur la figure de la belle-mère. Avec Les Enfants des autres, Rebecca Zlotowski signe son meilleur film, saturé de fraîcheur et d’intelligence.
L’Ombre de Goya. Documentaire de José Luis Lopez-Linares (1h30) – Dans ce sublime documentaire sur le peintre espagnol, l’écrivain et scénariste Jean-Claude Carrière est allé en Espagne sur ses traces. Il est ainsi émouvant de voir ce conteur, dramaturge, philosophe et scénariste au Prado, quelques semaines avant sa mort en février 2021, faire ses adieux aux deux Majas de Goya. Admiration d’un grand «regardeur » et d’un grand « restituteur » de l’histoire pour un autre ? Assurément. Car, avant Goya, quel autre chroniqueur pour cette Espagne chutant sans fin de son trône mondial ? Cervantès ? De lui aussi Carrière parlait bien. Mais Goya a eu la préférence. Interviennent encore le peintre et cinéaste Julian Schnabel ainsi que Charlotte Chastel-Rousseau, en charge de la peinture hispanique au Louvre. Tous évoquent un Goya fait d’énergie comme de délicatesse, un coloriste qui flamboie jusque dans son œuvre au noir, un homme des Lumières comme des anti-Lumières. Toiles officielles ou créations privées se succèdent donc pêle-mêle, sans ordre que celui des coups de cœur et les intuitions. Cela fait parfois désordre, mais Goya lui-même a pratiqué le capriccio éclairant.
Ninjababy. Drame de Yngvild Sve Flikke (1h43) – Elle a beau être égoïste, fêtarde, et sacrément immature pour ses 23 ans, Rakel, l’héroïne de Ninjababy s’avère diablement attachante. Comédie norvégienne qui n’a pas froid aux yeux, troussée par Yngvild Sve Flikke, ce pétulant long-métrage met en scène une jeune dessinatrice de BD qui se découvre enceinte de six mois. Horreur, malheur, trop tard pour pouvoir tenter une IVG ! Rakel est dans de beaux draps. D’autant qu’elle ne souhaite absolument pas devenir maman à son âge. Lointaine cousine de l’Américaine Juno (le joli film de Jason Reitman sorti en 2008), ou même de sa consœur norvégienne, Julie (en douze chapitres) révélé au public par Joachim Trier l’an dernier, cette Rakel ne manque pas de mordant. Mené tambour battant, le film traite joyeusement (mais sans concession ni sensiblerie) d’un thème qui pourtant ne prête pas à la plaisanterie, la maternité non désirée.