Projet de loi controversé, la loi Darmanin fera l’objet de « plusieurs textes », a annoncé Emmanuel Macron. Le texte est jugé trop inflammable dans le contexte de crise sociale et politique que vit la France.

La crise provoquée par la réforme des retraites va-t-elle avoir la peau du projet de loi immigration ? Le timing est quoi qu’il en soit mauvais, très mauvais. Emmanuel Macron a annoncé lors de son interview « lunaire » sur France2 et TF1, que le projet initial sera divisé en plusieurs textes. « Nous allons réajuster les choses aussi et découper des textes plus courts. Donc il y aura bien une loi immigration, il y aura plusieurs textes immigration et ils arriveront dans les prochaines semaines », a-t-il déclaré. Et de justifier : « nous n’avons pas le droit pour notre pays à l’arrêt ou à l’immobilisme ».
Annoncé depuis des mois, contesté par les associations de défense des exilés, conspué par la gauche et jugé très insuffisant par la droite et l’extrême droite, le texte qui a entamé son parcours en commission au Sénat la semaine dernière, devait initialement être débattu à partir de mardi dans l’hémicycle de la Haute Assemblée dominée par l’opposition de droite.
Mais sur fond de fièvre politique et sociale après l’adoption via le 49.3 de la très contestée réforme des retraites, l’exécutif change de stratégie. Le texte était jugé bien trop abrasif pour être débattu dans la foulée du texte sur les retraites nous ont rapporté des sources parlementaires. Il prévoyait à la fois des mesures pour faciliter les expulsions des étrangers délinquants et un volet intégration, notamment par un titre de séjour controversé dans les « métiers en tension ».
Darmanin en quête d’un compromis
Selon un conseiller de l’exécutif, Gérald Darmanin avait d’ores et déjà proposé en amont « de mettre dans ce cas d’autres vecteurs qui permettront d’avoir quand même des mesures immigration car c’est nécessaire, en les scindant en plusieurs textes. Par exemple: d’un côté un projet de loi avec les mesures consensuelles, comme la simplification du droit en vue d’accélérer le traitement des demandes d’asile, de l’autre des propositions de loi/initiatives parlementaires sur les autres sujets ». Selon une source parlementaire, « Gérald Darmanin cherche un compromis. Il y a différents scénarios mais rien de tranché encore entre ces hypothèses ».
Un projet « mal ficelé »
L’hypothèse d’un report ne semblait en tout cas pas chagriner les oppositions, avant l’annonce du président à la mi-journée. « Ce projet est totalement mal ficelé. Je crois qu’il ne répond pas aux besoins du pays. On ne peut pas faire semblant en matière de contrôle de l’immigration. Ce texte, je pense qu’il faisait semblant, c’est un texte de communication », avait taclé le patron des députés LR, Olivier Marleix, sur France Inter. « Ce texte, c’était le ‘en même’ temps macronien : « une immense ambiguïté et de la communication », a poursuivi Olivier Marleix. « Il y a beaucoup de travail je pense pour qu’il (le projet de loi) devienne présentable », avait-il complété.
Pour Bayrou, « ce n’est pas le moment »
Son homologue du groupe PS à l’Assemblée, Boris Vallaud, avait lui aussi critiqué sur Public Sénat « un texte ‘en même temps' ». « C’était un texte censé à la fois plaire à la droite, plaire à la gauche, finalement ça ne plaisait à personne parce que, en ce qui me concerne, je conserve un certain nombre de principes qui sont indivisibles et que ce n’est pas en coupant le salami en tranches qu’on le rend plus digeste. Donc si la copie est mauvaise, qu’ils la reprennent », a déclaré le député des Landes.
François Bayrou, fidèle allié d’Emmanuel Macron, a reconnu mercredi 22 mars sur Franceinfo que ce n’est pas le moment de voter cette loi, encore moins d’utiliser le 49.3 pour la faire adopter. « C’est un grand sujet d’inquiétude pour les Français. Ce n’est pas le moment de mettre sur la table des textes inflammatoires“, pour le maire de Pau selon qui utiliser le 49.3 pour ce texte “ne serait pas une bonne idée”.