Un réquisitoire contre l’obéissance aveugle, le portrait que Charlotte consacre à sa mère Jane (Birkin), le pacte dangereux d’un joaillier juif sous l’Occupation. Que faut-il voir cette semaine ? Découvrez notre sélection.
La Leçon d’Allemand, drame historique de Christian Schwochow (2h05) – Le son strident d’une sirène déchire le silence d’une maison de correction pour jeunes délinquants. Des prisonniers vêtus de blanc sont emmenés dans un amphithéâtre pour plancher sur une rédaction : « Les joies du devoir ». Tous travaillent. Seul un garçon relève la tête, pétrifié. L’intitulé de la dissertation a réveillé en lui un profond traumatisme. En 1943, Siggi a 10 ans lorsque son père, officier de police enfourche son vélo avec lui. Le brigadier zélé brave la tempête pour remettre une lettre à son ami d’enfance, le peintre Max Nansen (formidablement interprété par Tobias Moretti). Le IIIe Reich interdit définitivement l’exercice de la peinture à cet artiste dont l’art est qualifié de « dégénéré ». Déchiré entre la soumission à l’autorité paternelle, et son affection pour un artiste libre, le jeune Siggi se perd dans des abîmes de réflexion et de souffrance. Magnifiquement filmée, cette adaptation du best-seller mondial de Siegfried Lenz La Leçon d’allemand paru en 1968, constitue un vibrant réquisitoire contre l’obéissance aveugle.
Jane par Charlotte, documentaire de Charlotte Gainsbourg (1h30) – Depuis la mort de Serge Gainsbourg en 1991, Charlotte Gainsbourg s’est largement construite en tant que fille de celui-ci. Ces trente années de deuil sont sanctionnées aujourd’hui par l’ouverture prochaine de la Maison Gainsbourg à Paris, qui permettra aux nombreux admirateurs du génie de la chanson française de découvrir son antre de la rue de Verneuil. En attendant l’ouverture publique du musée, prévue dans le courant de l’année, Charlotte y a emmené sa mère. Jane Birkin n’avait pas remis les pieds dans la maison qu’elle a occupée pendant une douzaine d’années depuis trois décennies. La séquence est une des plus saisissantes du portrait que l’actrice et chanteuse consacre à sa mère. Touchante dans sa vulnérabilité et très digne dans sa peau de mère de famille paradoxale, Jane Birkin illumine chacun des plans du documentaire.
Adieu Monsieur Haffmann, drame historique de Fred Cavayé (1h56) – Tout commence en mai 1941 à Paris sur les hauteurs du quartier Montmartre. La petite cloche de la boutique du joaillier Joseph Haffmann (Daniel Auteuil, tout en dépouillement et dignité) résonne comme un funeste avertissement. L’homme sort de son échoppe et constate que l’on a fraîchement placardé une affiche où il est question du « recensement des Juifs » qui doivent désormais « se présenter aux autorités en application de la loi ». Il lui faut d’urgence mettre sa famille à l’abri. Le joaillier a imaginé une solution. Il va vendre la bijouterie à son employé, François Mercier. Il rejoindra ainsi sa famille plus tard. À la fin de la guerre, il reprendra son commerce et aidera son assistant à monter le sien. Fred Cavayé signe un drame historique tout en nuances, porté par trois excellents comédiens. Il se concentre sur l’essentiel et filme avec minutie une descente progressive aux enfers.