Vingt-cinq ans après l’assassinat du préfet Claude Erignac, « il est temps d’écrire une nouvelle page de l’histoire de la Corse » et le gouvernement a tendu lundi « la main » aux insulaires par la voix de son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

Le soir du 6 février 1998, Claude Erignac décédait sous les balles d’un tueur qui lui avait tiré dans le dos, dans la rue, alors qu’il se rendait à pied au théâtre. Lundi, Gérald Darmanin venu présider les commémorations à Ajaccio, sur le lieu du crime devenu place du souvenir, a estimé qu' »il est temps d’écrire une nouvelle page de l’histoire de la Corse », de « construire durablement la paix ».
L’île méditerranéenne connaît des rapports compliqués avec les gouvernements français et compte depuis des décennies des mouvements nationalistes réclamant davantage d’autonomie et pour certains l’indépendance, ainsi que des groupes clandestins. Les nationalistes sont à la tête des instances de l’île depuis 2015. Le gouvernement « tend la main aux innombrables Corses de bonne volonté, épris de paix et de fraternité » pour « tracer ensemble » une « route institutionnelle, économique, culturelle » et « pour la cause de la paix », a-t-il ajouté.
Un cycle de discussions sur l’avenir de la Corse
« Travaillons ensemble », a lancé le ministre car « les morts nous regardent ». Claude Erignac a été le seul préfet assassiné en France depuis la Seconde Guerre mondiale. Juste après sa mort, des dizaines de milliers de Corses avaient exprimé leur effroi lors des plus grandes manifestations jamais organisées à Ajaccio et Bastia. Trois hommes ont été condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité pour cet assassinat : Pierre Alessandri, Alain Ferrandi et Yvan Colonna.
Détenu à la prison d’Arles (Bouches-du-Rhône), le militant nationaliste Yvan Colonna a été victime de l’agression d’un codétenu, le 2 mars 2022, à laquelle il a succombé le 21 mars, ce qui a provoqué des semaines de manifestations violentes sur l’île. Depuis, un cycle de discussions sur l’avenir de l’île « à vocation historique » s’est ouvert cet été mais était grippé autour des refus répétés d’octroi de semi-liberté à Alain Ferrandi et Pierre Alessandri, libérables depuis 2017.
Hommage au Préfet Claude Erignac.
— Gérald DARMANIN (@GDarmanin) February 6, 2023
Retrouvez l’intégralité du discours que j’ai tenu ce matin à Ajaccio👇https://t.co/oyQ3BorsVI
L’annonce de la venue de M. Darmanin pour ces commémorations est intervenue fin janvier juste après celle, très attendue dans l’île, de l’octroi par la justice d’une mesure de semi-liberté à Pierre Alessandri. Alain Ferrandi attend, lui, la décision de la justice le 23 février sur une demande similaire. Jean-Christophe Angelini, à la tête du parti autonomiste de la nation corse (PNC, opposition), a salué auprès « une tonalité globale qui nous paraît incontestablement nouvelle et même inédite », espérant que « ce qui a été prononcé sera désormais suivi d’actes ».
Bâtir la paix
Pour l’évêque de Corse Mgr François-Xavier Bustillo, sur cette île très catholique, « la mémoire » sert à « éviter que des faits comme celui-là se reproduisent ». « C’est à nous de bâtir la paix, d’apprendre des fautes du passé pour construire un monde meilleur, plus juste et plus pacifique. » Sur la place Erignac, où se dressent désormais un olivier et l’inscription « 1 homme, 1 place », le ministre de l’Intérieur a rendu hommage à l’homme « lumineux, droit et intègre » devant un parterre d’élus et de personnalités.
Au même moment à Paris, le président Macron recevait la famille Erignac. Pour le 20e anniversaire, le chef de l’Etat avait fait son premier déplacement sur l’île depuis son élection, accompagné de Mme Erignac et de ses deux enfants dont c’était le premier retour en Corse depuis les faits.
La Première ministre Elisabeth Borne a estimé lundi sur Twitter qu' »assassiner un Préfet, c’est frapper toute la Nation », rendant « hommage à cette grande figure de la République ».