Après le remaniement, ou l’ajustement (c’est selon), le gouvernement Borne se voit contraint de chercher des solutions au cas par cas, selon les textes. La nouvelle « équipe » semble indiquer que la macronie ne fait plus rêver.
Il y a ceux qui restent, ceux qui migrent, ceux qui partent et ceux qui reviennent… Il y a ceux du centre, ceux prétendument de gauche et ceux prétendument de droite. En tout, trente et un ministres et dix secrétaires d’Etat composeront cette nouvelle brochette Borne. Un gouvernement « Borgne » II né sans trompettes n’a confirmé que les dires des uns et des autres, puisqu’apparemment, rien n’est plus secret en macronie, à part les conflits d’intérêts et les Conseils de défense. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, affirmait lundi matin qu’il conservait sa place avant même que l’annonce soit officielle.
En tout, treize ministres restent sagement en place, mais pas les plus consensuels. Par exemple, le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, honni par une bonne frange du monde Justice, reste assis place Vendôme. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, dont la cote de popularité depuis le scandale du Stade de France n’a rien à envier à son collègue, est également confirmé. Il est non seulement maintenu à son poste, mais il « gratte » aussi les outre-mer. Il devrait y vadrouiller tout l’été. Des vacances à moindres frais.
Preuve supplémentaire s’il en fallait, l’arrivée d’Olivier Véran – que certains se plaisaient jadis à surnommer le « véreux » – devient le porte-parole de l’exécutif. Langue bien pendue, celui qui a passé près de deux ans durant la crise covid à égrener les morts auxquels sa politique a contribué, viendra donc devant la presse et les Français faire les annonces et guignoleries habituelles sur la politique gouvernementale qui ne devrait pas manquer d’être mortifère. Concrètement, si revoir Olivier Véran doit provoquer quelques toux grasses à s’étouffer, l’arrivée de l’ex ministre de la Santé à ce poste est objectivement un pis-aller pour un homme dont les dents rayent le parquet depuis bien longtemps. Macron montre d’ailleurs son embarras par le ballotage du neurologue. En effet, se débarrasser de lui reviendrait à renier la politique menée durant la crise sanitaire. Alors cerise sur le gâteau, Véran, en plus d’être porte-parole, est aussi ministre délégué chargé du renouveau… Démocratique (rires !) Pour un ministre ayant enfermé les Français chez eux, imposant même une auto-attestation pour faire crotter son toutou, cette nomination ne manque pas de croustillant.
Du côté de la santé, Brigitte Bourguignon battue aux législatives a enfin été virée. Elle est remplacée par un nom qui avait circulé avant elle, le médecin urgentiste François Braun. Chargé du programme Santé du candidat Macron, il apporte aussi son statut de président de SAMU urgence de France. Il sera épaulé par le ministre délégué chargé de l’organisation territoriale et des professions de santé, Agnès Firmin le Bodo, elle-même pharmacienne et députée sous l’étiquette Agir. Ces deux choix illustrent la volonté de ce qui reste d’orgueil de Jupiter de mettre en sourdine les critiques sur ce nouveau gouvernement trop rempli de technocrates. Ce qui, il faut bien le dire, n’a pas vraiment fait les affaires du pays.
Par ailleurs, le secteur de la santé étant dans un état de mort cérébral avéré et des services d’urgences explosant un à un partout sur le territoire, il est donc plutôt judicieux d’avoir choisi un médecin qui exerce, afin qu’il ait une chance d’éteindre l’incendie auprès de ses pairs. Il n’en reste pas moins qu’au vu du discours dominant sur la question du méchant covid depuis 2 ans, l’homme largement favorable à la vaccination récurrente de masse, et peu enclin à réintégrer ses collègues soignants suspendus, ne devrait pas surprendre avec la future loi de prolongation de l’état d’urgence sanitaire. Néanmoins, avec l’absence de majorité absolue pour la macronie et les tensions sur ce point, tout porte à croire que le pass vaccinal ou pas sanitaire ne devrait pas être remis en service dans les prochaines semaines. Restons vigilants, toutefois.
L’autre point à relever de ce gouvernement qui n’en est pas un, Clément Beaune quitte les affaires européennes pour rejoindre fissa les transports. Eurobêta convaincu, le quadra à tête de nain de jardin n’était pas vraiment un fervent défenseur de la souveraineté française. Nous dirons que son transfert est « plutôt » une bonne nouvelle. Il est remplacé par Laurence Boone, secrétaire d’État chargée d’Europe. Moins drôle que Dany (Boone) [je sais, je sais…], elle fait office d’ouverture à gauche, c’est elle qui conseillait jadis « Flamby » Hollande ! On connaît la suite. Profil d’économiste reconnue et mondialiste, Mme Boone est passée par les grands groupes d’assurance et de banques.
Autre cartouche vide de gauche, l’ancien communiste et soutien de Benoît Hamon, Olivier Klein, devient ministre délégué chargé de la ville et du logement. Il faut aussi noter le grand retour de Marlène (Schiappa), secrétaire d’État chargée de l’économie sociale et solidaire et de la vie associative (atchoum !) L’histoire ne nous dit pas avec quelle marque de shampoing elle signera son prochain contrat beauté.
Enfin, du côté du ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse, on ne change pas une équipe qui perd. Pap N’Diaye est conservé dans ses fonctions pour administrer l’école publique qu’il ne juge pas apte à éduquer ses propres enfants, qui vont, eux, à l’École alsacienne !
Vous l’aurez compris, ce gouvernement » Borgne » II s’est visiblement constitué au mépris des élections législatives. Les ouvertures prétendument à droite avec l’ex membre des Républicains (LR) Christophe Béchu, promu au rang de ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, se voit dans un ministère qui a dégringolé dans l’ordre protocolaire de la 5e à la 10e place.
La Première ministre, confirmée dans ses fonctions après avoir déposé sa démission, s’est abstenue de demander la confiance avant son discours de politique générale attendu le mercredi 6 juillet devant le Parlement. Il reste toutefois qu’un passage en force dans ce cas d’absence de vote pourrait aussi conduire à une motion de censure lancée par l’opposition et tout particulièrement La France insoumise. Si cette motion obtient une majorité, le même châtiment peut conduire à remanier le gouvernement.
En réalité, il est fort probable que Mme Borne surprenne les médias qui rapportent fidèlement ce qui filtre à dessein dans les alcôves ministérielles et demande la confiance pour l’obtenir grâce à une partie des Républicains notamment, mais aussi à quelque bonne âme bien intentionnée qui expliquera ensuite ne pas avoir voulu bloquer le pays. Macron pourra alors repartir sur un calendrier un peu plus laborieux, surjouant ainsi cette confiance accordée par le Parlement ; ce nouveau Parlement qui assumera aussi difficilement son vote que son absence de censure. Ce mode opératoire cadrerait ainsi avec l’intervention du locataire de l’Élysée au Journal télévisé à 20 h, il y a quelques semaines. Lui, qui exhorte l’opposition à faire preuve de responsabilité, pourrait bien être celui qui pousse ses opposants à remplir leur rôle, et peut-être définitivement disparaître de la scène politique.