Un an après le début de la crise sanitaire et économique, le déclin du secteur automobile se poursuit jusqu’à atteindre un niveau de production équivalent à celui des années 1960. [Explications]
France recherche pilote désespérément… Si le message peut paraître idiot, la situation industrielle française est pourtant catastrophique. Frappée de plein fouet par l’épidémie de covid et ses conséquences économiques, l’industrie française est au bord du gouffre. Un secteur illustre en particulier ce long déclin : l’automobile. En effet 2020 a été la pire année depuis des décennies pour ce secteur jadis si lucratif. Le niveau de production a baissé de 40 % pour arriver au niveau des années 1960. Un retour 60 ans en arrière qui n’est pas sans conséquences, soutenu par les choix politiques incohérents de la Macronie, où la souveraineté industrielle est plus que mise à mal.
Ainsi les fermetures de sites au cours des dernières années, à l’instar de Bridgestone à Béthune en 2020, Michelin à La Roche-sur-Yon en 2019, Goodyear à Amiens en 2013 et Continental à Clairoix en 2009 – pour ne citer que quelques exemples -, s’enchaînent au profit de délocalisations dans des pays à moindre coût comme le rappelle Laurent Izard, normalien agrégé d’économie et auteur de « La France vendue à la découpe » :
On ne produit quasiment plus de petites voitures en France, parce qu’elles dégagent des marges insuffisantes. Il faut s’inquiéter de ce phénomène d’autant qu’on attend dans les années à venir une offensive des Chinois qui vont proposer sur le marché européen et français des automobiles à moins de 5.000 €. On peut donc s’interroger sur la compétitivité de nos propres firmes.
Un coût du travail élevé rendant impossible la production de petits modèles sur le sol français, une aubaine pour les Chinois et une catastrophe pour la compétitivité française… Bref, qui dit manque de compétitivité dit aussi désastre annoncé. D’ailleurs la France a battu l’an dernier le record atteint en 2019 de déficit commercial automobile à hauteur de 15,4 milliards d’euros : le résultat de 55,8 milliards d’euros d’importation de véhicules et de pièces détachées contre 40,4 milliards pour les exportations. Un déficit qui ne cesse de se creuser alors qu’au milieu des années 2000 l’excédent du secteur automobile français atteignait encore 10 milliards d’euros.
Ainsi ce secteur est tout simplement devenu le troisième poste le plus déficitaire du commerce extérieur français. Si le covid apparaît comme le coupable idéal en attendant des jours meilleurs, M. Izard réfute cette idée et la trouve un peu facile :
C’est un peu facile d’incriminer le covid. Il y a eu un certain nombre de délocalisations d’usines, parfois des délocalisations déguisées. Par exemple, on ferme un site en France en disant qu’il n’y a plus de possibilités d’avenir pour ledit site, puis on en ouvre un autre, un ou deux après, soit en Turquie, soit au Maroc. Et nous voyons que ce processus est long. Si l’on veut l’inverser ça va être compliqué.
Fruit de décennies de mauvaises décisions, l’industrie française est cruellement au bord du précipice avec le risque majeur de voir les usines de deux fleurons – Renault et PSA – quitter définitivement la France pour ne garder de français que le nom et la présence des sièges sociaux. Un départ synonyme également de destruction de milliers d’emplois. Une réindustrialisation nécessaire pour éviter une faillite totale est urgente. Mais il semblerait que le processus ne soit pas encore dans les tuyaux de nos dirigeants ou sur les tables d’une Macronie agonisante.