Deux jours après la découverte d’une fissure profonde à Penly 1, EDF a détecté de nouveaux défauts « non négligeables » à Penly 2 et Cattenom. Ces complications pourraient bouleverser le calendrier de maintenance des centrales françaises et peser sur la production.

Le sujet prend de l’ampleur. Deux jours après la découverte d’une fissure profonde dans un circuit du réacteur de Penly 1 , EDF a détecté un autre défaut « non négligeable » sur une soudure d’une tuyauterie de secours dans deux réacteurs, a révélé jeudi soir l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Cette complication supplémentaire pourrait bouleverser le calendrier de maintenance des centrales françaises et peser sur la production nucléaire d’EDF.
Des contrôles ont permis de détecter la présence de fissures dans le réacteur 2 de la centrale nucléaire de Penly (Seine-Maritime) et le réacteur 3 de la centrale de Cattenom (Moselle), selon une note de l’ASN.
Une fissure de taille jamais vue
A Penly 2, la fissure mesure 57 mm de long, représentant moins de 10 % de la circonférence, pour une profondeur maximale de 12 mm. « Ce n’est pas anodin, il s’agit d’une profondeur non négligeable », souligne Julien Collet, directeur général adjoint de l’ASN. L’autre fissure a été repérée à Cattenom 3, longue de 165 mm, ce qui représente environ le quart de sa circonférence, pour une profondeur maximale de 4 mm.
Le gendarme du nucléaire avait demandé l’an dernier à l’énergéticien d’examiner toutes les soudures qui avaient été reprises lors de la construction des centrales. Il y en a 320. Selon nos informations, environ 200 restent à passer au crible.
Ce travail a provoqué la découverte d’une fissure de taille encore jamais vue dans le réacteur de Penly 1, sur une conduite d’urgence servant à inonder d’eau le réacteur en cas d’accident nucléaire. Cette fissure « s’étend sur 155 mm, soit environ le quart de la circonférence de la tuyauterie, et sa profondeur maximale est de 23 mm, pour une épaisseur de tuyauterie de 27 mm », avait détaillé l’ASN mardi.
« Fatigue thermique »
Le phénomène dit de « corrosion sous contrainte », à l’origine des pertes les plus élevées de l’histoire d’EDF , identifié en octobre 2021 sur plusieurs sites, concernait de plus petites fissures et sur d’autres zones de ces tuyauteries.
Les fissures révélées ces derniers jours par l’ASN ne sont pas liées à ce phénomène de corrosion sous contrainte, mais à celui de « fatigue thermique », qui apparaît sur les aciers inoxydables quand une pièce est soumise à des variations de températures. Ce phénomène est « bien connu et surveillé de longue date au titre des programmes historiques de maintenance préventive », selon EDF.
En revanche, il n’était pas attendu sur la zone de la tuyauterie où il a été découvert, selon l’ASN. « Cela ne change pas le programme de contrôles à court terme, mais EDF devra adapter son programme de maintenances pour inclure les contrôles sur la fatigue thermique sur des zones plus larges », a indiqué Julien Collet.
Avec cette affaire, Luc Rémont, le nouveau PDG d’EDF, vit sa première crise industrielle. Le groupe doit remettre à l’ASN une stratégie de contrôle révisée dans les prochains jours. Un travail sensible et titanesque qui pourrait provoquer potentiellement des arrêts prolongés de réacteurs et grever davantage la production nucléaire, qui évolue déjà à des niveaux historiquement bas . Les marchés ont aussi réagi à ce risque : le prix de l’électricité a bondi de 9 % sur le marché à terme dans la foulée de ces nouvelles découvertes.