Précarité, démotivation, sentiment d’abandon… Corpo Paris II et plusieurs associations tirent la sonnette d’alarme quant à la santé mentale des étudiants.
Face à l’inaction de l’executif et de la ministre Frédérique Vidal, la Corpo Paris II et plusieurs associations dénoncent une véritable bombe à retardement sociale et humaine planant sur les étudiants et plaident pour que Macron ne laisse pas les étudiants s’enfermer dans la solitude et la dépression. « Un tiers des étudiants ont présenté des signes de détresse psychologique » durant le premier confinement, rappelait le ministre de la Santé, Olivier Véran, le 19 novembre 2020. Un constat optimiste, au regard des résultats d’une enquête publiée cinq mois plus tôt dans laquelle on apprenait que deux tiers des étudiants ressentaient le besoin de se confier à quelqu’un, d’être écoutés, et que 23 % auraient des pensées suicidaires.
Et cela présageait du pire pour le second confinement. En novembre, près des trois quarts des 700 jeunes interrogés par une association de lutte pour l’égalité des chances, s’étaient dit stressés et épuisés par l’incertitude ambiante liée à la crise sanitaire et un troisième confinement pourrait être fatal chez les étudiants les plus défavorisés en plus de la difficulté à suivre les cours à distance et de la précarité économique qui s’accroît. La rentrée scolaire de septembre 2020 avait été lourde en déceptions : le premier trimestre a éloigné tout espoir de sortie de crise et de reprise d’une vie étudiante normale.
Je me sens extrêmement stressée, le confinement me rend assez mal mentalement,
témoigne Pauline à Quotidien Libre.
Je maintiens un lien avec mes amis via les réseaux sociaux mais parfois, la solitude se fait ressentir. Reprendre des cours normalement, sortir librement, me promener dans la rue avec des amis, aller manger au restaurant, toutes ces petites choses me manquent.
« J’ai une grande perte de motivation, alors qu’en septembre après avoir vécu le premier confinement j’avais eu envie de me redonner du « peps » pour repartir, témoigne Alice, interrogée par Quotidien Libre. Même après le premier semestre écoulé et un deuxième confinement, j’ai une grosse perte de motivation. Je ne fais même plus mes devoirs. » Pour mieux assurer les cours en ligne, les universités se sont dotées l’été dernier de matériel supplémentaire, mais cela ne vaut pas le présentiel. Au domicile des étudiants, les problèmes de connexion, d’équipements et d’environnement de travail peu adapté sont encore d’actualité, même si le ministère de l’Enseignement supérieur s’engage à fournir le matériel à ceux qui sont dans le besoin. Rappelons que ces problèmes avaient rendu difficile le suivi des cours pour plus de la moitié des étudiants au début de la crise. « Je travaille beaucoup moins bien qu’auparavant (gros problèmes de concentration). On entend mal le/la professeure, impossible de poser des questions en direct. Pour un de mes cours où j’ai beaucoup de difficultés, on m’a juste envoyé un manuel avec des exercices à faire seule. »
La précarité s’installe dangereusement dans le temps
Le deuxième confinement a balayé l’espoir de sortir des difficultés financières qui avaient touché trois quarts des étudiants. Que dire d’un troisième confinement ? 45 % des jeunes interrogés en novembre se disent ainsi inquiets pour leur situation financière. Comme une double peine, la crise sanitaire a ainsi accru les difficultés financières des étudiants précaires, pour qui le confinement est particulièrement difficile à vivre dans des logements petits, avec de maigres courses alimentaires. Au premier confinement, les Agoraé (épiceries solidaires dédiées aux étudiants) avaient fait face à une demande sans précédent. En quelques mois seulement, plus de jeunes ont été aidés que depuis le lancement de la première épicerie en 2011. « Entre les deux confinements, mon stage de fin d’étude a été repoussé, allongeant ainsi mes études, explique un étudiant. Le Crous a refusé ma demande de bourse cette année au motif que je suis en fin de droit. Mon stage n’était pas payé, je n’ai plus aucune ressource, vraiment aucune. J’ai eu 25 ans cet été, il y a donc des aides, qui m’avaient aidé lors du premier confinement (FAJ) auxquelles je ne peux plus postuler aujourd’hui. Et je ne peux même pas faire des activités gratuites pour me changer un peu les idées (musées, cinémathèque à 1 € à Aix, promenades dans la nature), puisque le gouvernement a décidé de tout fermer ».