Avec 13 nominations, le marivaudage d’Emmanuel Mouret coiffe d’un cheveu l’idylle gay d’Ozon et la satire d’Albert Dupontel dans une 46e cérémonie qui ne redoute plus le rire et la comédie.
Voici ce qu’ont retenu les César du cru cinématographique 2020 si particulier, marqué par deux confinements, un arrêt des tournages et six mois de fermeture des salles. Le délicat marivaudage d’Emmanuel Mouret Les Choses qu’on dit, Les Choses qu’on fait , la romance estivale tirant sur le noir Été 85 de François Ozon et Adieu les cons d’Albert Dupontel font le plein mercredi de nominations en prévision de la 46e édition des César, qui se dérouleront le 12 mars. Ce trio fera face dans la catégorie reine du César du meilleur film au documentaire Adolescentes et à la comédie à dos d’âne Antoinette dans les Cévennes , en lice à huit reprises. Preuve qu’en 2021 les César ne boudent pas totalement le rire, ni la légèreté même si La Daronne et Effacer l’historique, primé à Berlin, se contentent d’une nomination.
Emmanuel Mouret fait le grand chelem avec 13 nominations et accroche toutes les catégories majeures : meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario, meilleure actrice pour Camélia Jordana, meilleur acteur pour Niels Schneider et meilleurs seconds rôles pour Émilie Dequenne et Vincent Macaigne. Le dixième long-métrage du réalisateur de 50 ans devance d’un cheveu la romance gay Été 85 et Adieu les cons qui font jeu égal avec 12 citations. Nommé pour une sixième fois dans la catégorie meilleur réalisateur, François Ozon espérera avec Été 85 repartir avec son premier César. La tâche sera plus ardue pour ses deux jeunes stars Benjamin Voisin et Felix Lefebvre qui risquent de se diviser les votes chez les meilleurs espoirs. Leur partenaire Valeria Bruni-Tedeschi devra chez les seconds rôles surpasser Fanny Ardant (ADN ) et deux des comédiennes de La Bonne épouse Yolande Moreau et Noémie Lowsky.
Pas de raz de marée des réalisatrices, c’est regrettable
Même concurrence frontale pour le trophée de la meilleure actrice qui oppose les héroïnes de Deux, idylle lesbienne sur fond de thriller que la France a choisi pour la représenter aux Oscars. Le premier film de Filippo Meneghetti accroche quatre citations. Barbara Sukowa et Martine Chevallier feront donc face à Camélia Jordana, Virginie Elfira (Adieu les cons) et la pétillante Laure Calamy d’Antoinette dans les Cévennes. Stars de La Bonne épouse et ADN, Juliette Binoche et Maïwenn brillent par leur absence. Chez les hommes, le trophée se jouera entre Jonathan Cohen pour la comédie Énorme, Lambert Wilson très sérieux de Gaulle dans le biopic du même nom, le décapant Albert Dupontel, Niels Schneider et Sami Bouajila qui a déjà eu pour Un Fils les faveurs des prix Lumières, remis par la presse étrangère.
Maïwenn se glisse néanmoins, grâce à ADN, dans la catégorie meilleure réalisation. Malgré le succès critique d’Antoinette dans les Cévennes de Caroline Vignal et de Mignonnes de Maimouna Doucouré (retenue dans la section meilleur premier film), ce sera la seule femme du quinté. Elle essaiera de prévaloir face à Ozon, Mouret, Dupontel et le documentariste Sebastien Lifschitz auteur du très remarqué Adolescentes qui a remporté fin janvier le prix Louis-Delluc, considéré comme le Goncourt du cinéma. Ce portrait totalise six nominations et déborde largement de sa catégorie naturelle.
Année de mutation
Après une année très particulière, marquée par des mois de fermeture des salles pour cause de pandémie, les 4292 votants ont dû faire leur choix parmi 125 films qui ont réussi malgré tout à sortir. Un peu plus de la moitié d’entre eux (54,9%) ont voté. Les membres de l’Académie des César, forcée de profondément se renouveler cette année après avoir été mise à mal par une crise de gouvernance et l’affaire Polanski notamment, ont désormais jusqu’au 12 mars pour désigner les lauréats. Toujours diffusée sur Canal +, la cérémonie aura lieu à l’Olympia, le soir même, sous la présidence de Roschdy Zem, avec Marina Foïs en maîtresse de cérémonie, Laurent Lafitte et Blanche Gardin à l’écriture des sketchs. «Cette cérémonie doit être un signal fort, un marqueur de talents, notamment des jeunes générations, mais aussi de la force créative de l’animation, du documentaire, du court-métrage», promet la nouvelle présidente de l’Académie, Véronique Cayla.
Liste des principales nominations :
Meilleur film
- Adieu les cons d’Albert Dupontel
- Adolescentes de Sébastien Lifshitz
- Antoinette dans les Cévennes de Caroline Vignal
- Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait d’Emmanuel Mouret
- Eté 85 de François Ozon
Meilleure réalisation
- Albert Dupontel pour Adieu les cons
- Maïwenn pour ADN
- Sébastien Lifshitz pour Adolescentes
- Emmanuel Mouret pour Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait
- François Ozon pour Eté 85
Meilleure actrice
- Laure Calamy dans Antoinette dans les Cévennes
- Martine Chevallier dans Deux
- Virginie Efira dans Adieu les cons
- Camélia Jordana dans Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait, Barbara Sukowa dans Deux.
Meilleur acteur
- Sami Bouajila dans Un fils
- Jonathan Cohen dans Enorme
- Albert Dupontel dans Adieu les cons
- Niels Schneider dans Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait Lambert Wilson dans De Gaulle
Meilleure actrice dans un second rôle
- Fanny Ardant dans ADN
- Valeria Bruni Tedeschi dans Eté 85
- Emilie Dequenne dans Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait Noémie Lvovsky dans La Bonne épouse
- Yolande Moreau dans La Bonne épouse
Meilleur acteur dans un second rôle
- Edouard Baer dans La Bonne épouse
- Louis Garrel dans ADN
- Benjamin Lavernhe dans Antoinette dans les Cévennes
- Vincent Macaigne dans Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait
- Nicolas Marié dans Adieu les cons
Meilleur premier film
- Deux de Filippo Meneghetti
- Garçon chiffon de Nicolas Maury
- Mignonnes de Maïmouna Doucouré
- Tout simplement noir de Jean-Pascal Zadi et John Wax
- Un Divan à Tunis de Manele Labidi
Meilleur espoir féminin
- Mélissa Guers dans La Fille au bracelet
- India Hair dans Poissonsexe
- Julia Piaton dans Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait
- Camille Rutherford dans Felicità
- Fathia Youssouf dans Mignonnes.
Meilleur espoir masculin
- Guang Huo dans La Nuit venue
- Félix Lefebvre dans Eté 85
- Benjamin Voisin dans Eté 85
- Alexandre Wetter dans Miss
- Jean-Pascal Zadi dans Tout simplement noir
Meilleur film étranger
- 1917 de Sam Mendes
- La Communion de Jan Komasa
- Dark waters de Todd Haynes
- Drunk de Thomas Vinterberg
- Eva en août de Jonas Trueba