Près de six ans après l’horreur, le procès des attentats du 13-novembre 2015 à Paris est sur le point de s’ouvrir. Alors que la menace terroriste est toujours élevée en France, la tenue de ce procès est considérée comme un événement à risque. [Décryptage]
C’est la plus grande audience criminelle jamais organisée en France. Ils sont vingt accusés, mais ne seront que onze à prendre place dans le box ce mercredi, lors de l’ouverture du procès. Parmi eux, Salah Abdeslam, seul survivant des commandos qui ont semé la mort : huit attaques en une soirée seulement, du Stade de France où avait lieu le match de football France – Allemagne à la salle de spectacle du Bataclan où le groupe de rock Eagle of death metal donnait un concert, en passant par les terrasses bondées des 10e et 11e arrondissements de la capitale. Bilan ? Plus de 130 morts et près de 350 blessés, soit les attaques les plus meurtrières jamais commises en France.
L’enquête qui a duré quatre ans a produit un dossier d’instruction pharamineux sur lequel neuf juges antiterroristes ont travaillé : un million de pages le constitue, classé en 542 tomes. Un total de 45 000 procès-verbaux, rapports d’experts, retranscriptions d’auditions, analyses scientifiques ou compte-rendus d’investigations y sont consignés. Au vu de l’ampleur du dossier et du nombre d’accusés de partie civile, près de 1 800 sont représentés par 300 avocats. Le procès est prévu pour durer 9 mois jusqu’au 25 mai 2022. Symboliquement, il n’y aura pas d’audience le 13 novembre.
Concernant les accusés, tous soupçonnés d’avoir joué un rôle dans la préparation ou la réalisation des attentats du 13-novembre, onze d’entre eux comparaitront détenus, dont Salah Abdeslam. Trois ne seront pas dans le box vitré, mais juste devant, car ils ont été remis en liberté sous contrôle judiciaire. Six autres, devant être jugés, serons absents. L’un est détenu en Turquie et sa comparution en France n’a pas été permise. Les cinq autres, dont les frères Clain, sont vraisemblablement morts en zone Irako-syrienne après avoir rejoint les rangs de l’État islamique (EI). Sans preuve de leur disparition, ils doivent tout de même être jugés.
Pour accueillir cette brochette de terroristes islamistes et le petit monde qui l’entoure, des travaux estimés à plus de 7,5 millions d’euros ont été réalisés dans le palais de justice de l’Ile de la Cité. Une salle d’audience spéciale a même été créée mesurant 750 m2. Au total, 550 personnes pourront s’y trouver en plus de celles-ci. Quinze autres salles, plus petites, retransmettront le procès sur des écrans télévisés. Compte tenu du caractère historique de ce procès, et alors que la menace terroriste est toujours aussi tendue, un dispositif sécuritaire a été prévu en conséquence. Pas moins de 12 portiques de sécurité ont été installés. A l’extérieur du Palais de Justice, un large périmètre de sécurité devrait être mis en place pour protéger le tribunal, ses différentes entrées et la salle d’audience.
Enfin pour les victimes et leurs proches qui assisteront au procès, un système de cordon a été prévu pour différencier ceux qui acceptent de témoigner auprès des journalistes et ceux qui refusent. Ce procès fleuve, à l’image de ceux des attentats de janvier 2015, est surtout dédié aux victimes et leurs proches pour que chacun puisse tourner en partie la page d’une nuit d’horreur. Les accusés, eux, encourent tous entre 20 ans de prison et la réclusion à perpétuité.