Selon Mediapart, le Garde des Sceaux aurait perçu en 2013 une étrange somme d’argent. Une affaire qui vient à nouveau éclabousser l’Ours des prétoires.
C’est une automobile qui pourrait coûter plus chère qu’au moment de son achat. Après 14 mois place Vendôme et une mise en examen à son actif, une nouvelle affaire de malversation vient frapper Éric Dupond-Moretti. L’actuel ministre de la Justice, souvent arbitre des élégances de la macronie, a décidément du plomb dans l’aile. Une semaine après le rejet de la Cour de cassation de la demande de récusation des magistrats de la Cour de Justice de la République, à l’origine de sa mise en examen, c’est Mediapart qui publie les détails de ce qui pourrait être un nouveau scandale au sein du gouvernement et un caillou de taille dans la chaussure d’Acquittator.
Le site d’informations généralistes révèle qu’en 2013 une somme de 100 000 euros aurait été versée par Exelyum, une société implantée aux Seychelles, sur le compte professionnel de M. Dupond-Moretti. Jusque-là « presque » rien d’anormal quand on sait que le Garde des sceaux a acquis ses lettres de noblesse en défendant le banc et l’arrière-ban du grand banditisme. Mais il persiste un problème: mis à part le virement des 100 000 euros depuis un compte offshore, aucun lien n’est établi entre M. Dupont-Moretti et la société précitée; entreprise dans laquelle son dirigeant, un certain Jean-Pierre Nitkowski, a été jadis poursuivi pour une large escroquerie organisée autour de la Pyramide de Ponzi (un montage financier frauduleux, NdlR) à l’instar du scandale Madoff. Autrement dit, ni la société, encore moins son patron, n’ont été officiellement défendus par le célèbre avocat devenu sous-fifre de Macron.
Pour ajouter du trouble à cette histoire, il semblerait que cette somme d’argent ait rapidement été transférée sur un deuxième compte bancaire – personnel celui-là – de l’avocat; compte tout juste ouvert pour l’occasion. L’ogre du barreau se serait alors rué sur le Rocher de Monaco afin d’y acquérir une Maserati Grancabrio noire pour la modique somme de 95.158 euros. Les 20.158 euros de différence auraient été versés en cash par l’avocat, selon les documents consultés par Mediapart. Le patron du garage, interrogé depuis, a affirmé que ce « client particulier » n’était pas un habitué et que de coutume on ne pouvait pas payer plus de 3 000 euros en liquide.
A quoi correspondait donc ce versement de 100 000 euros versé à Éric Dupond-Moretti ? C’est cette question qui intrigue le juge d’instruction Marc-Emmanuel Gounot, chargé de l’affaire Exelyum. Au fil de son enquête, le magistrat Lyonnais a découvert que Jean-Pierre Nitkowski aurait bénéficié des conseils d’un certain Immanuel de Agrella, avec lequel il aurait été en détention à Monaco en décembre 2012. Ce co-détenu était alors défendu par Me Dupont-Moretti. En échange de bons tuyaux boursiers, le patron d’Exelyum aurait payé les frais d’avocat de son compagnon de cellule. Une information confirmée par le cabinet du Garde des Sceaux :
Éric Dupond-Moretti a défendu les intérêts de Monsieur Immanuel di Agrella, ce qui a fait l’objet d’une facturation et d’une perception d’honoraires.
Notons à ce titre que le règlement intérieur des avocats interdit le paiement d’honoraires par un tiers autre que son client ou le mandataire de celui-ci. Le juge Gounot réclame à l’avocat de M. Dupond-Moretti les mails échangés avec l’épouse de M. Agrella, puis des précisions sur les dispositions financières expliquant le trajet du versement des 100 000 euros, mais en vain. Et sans surprise, au sujet de l’enquête de Mediapart, le Garde des Sceaux au volant de son « aspirateur à minettes » reste singulièrement muet.