Perturbé en 2020 à cause du contexte sanitaire, le ban des truffes de Richerenches, évènement prisé des connaisseurs de truffes noires, a été fixé cette année au samedi 4 décembre. Une édition 2021 qui s’est déroulée sous de bien meilleurs auspices avec, à nouveau, son cérémonial habituel et festif.

Dès 10 heures, le cortège des membres de la Confrérie du Diamant noir & de la Gastronomie s’est formé à côté de l’église de Richerenches avant de se mettre en marche à 10 h 30 pour traverser le vieux village (à deux reprises, Ndlr) Grand-maître en tête, jusqu’à l’avenue de la Rabasse. Là, une estrade était installée pour accueillir Henri Veyradier (Grand Maître) et le maire de Richerenches Pierre-André Valayer qui a déclaré aux alentours de 11 heures l’ouverture officielle du ban des truffes.
Dès midi, après avoir humé les senteurs du diamant noir sur le cours Mistral notamment, courtiers, trufficulteurs, touristes et curieux se sont retrouvés nombreux sur l’avenue de la Rabasse (le nom de la truffe en provençal). Jusqu’à la mi-mars, le public a l’occasion de (re)découvrir et savourer les célèbres omelettes aux truffes préparées et servies comme chaque samedi midi dans la salle des fêtes au profit des associations du village. Pour ceux qui sont prêts à découvrir des plats plus travaillés, le chef Nicolas Pailhès du restaurant gastronomique L’Escapade propose là aussi des recettes préparées avec des truffes noires melanosporum. Rien d’étonnant à ce que le chef Mathieu Desmarest du restaurant Pollen à Avignon le surnomme avec d’autres confrères de la région le « Roi de la truffe noire ».
Bien implanté au cœur de l’Enclave des Papes en Drôme provençale, Richerenches jouit d’une réputation à tenir, celle de la capitale de la truffe à l’échelle nationale. Il s’y commercialise 1 tonnes de truffes noires par semaine, soit 40% environ de la production française. La sénatrice de la Drôme Marie-Pierre Monnier (PS), fervente défenseure du précieux champignon travaille et promeut la filière entre Paris et le département :
C’est important pour moi d’être ici, ce matin à Richerenches. Je suis une femme de terrain, j’ai pris mon mandat avec cette volonté d’être en contact direct avec les Drômois,
souligne la Présidente de la section d’études Culturelles traditionnelles et spécialisées du Sénat.
[…] En Trufficulture, l’idée est de dresser un point complet sur la filière, analyser ses problématiques et comment l’aider. Nous avons déjà auditionné le President de la Fédération Française de la Trufficulture, Alain Ambialet, avec qui je reste en contact. Il y a quelques années son prédécesseur, Michel Tournayre, avait soulevé plusieurs points notamment la structuration de la filière avec France Agrimer. L’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer avait commencé un travail de fond mais ils ont besoin qu’une expertise soit renouvelée pour la structurer (filière truffes,Ndlr). M. Tournayre avait notamment relevé un problème de taxe des défrichages. Nous avons travaillé sur des amendements mais le Conseil constitutionnel a retoqué et nous a dit qu’il fallait faire un texte spécifique sur le sujet. Le sujet des arômes artificielles est également un point important à analyser.
[…] Avec un administrateur du Sénat et trois personnes du ministère (de l’Agriculture, Ndlr), nous avons posé les éléments nécessaire à l’élaboration d’une discussion et nous avons été écouté. Un ancien député, Jean Launay, est très engagé lui aussi sur la filière. Avec mon homologue à l’Assemblée nationale nous allons tous organiser une visite en présentiel au ministère le 20 décembre prochain, pour remettre les choses à plat.
La Drôme et la truffe
Il fut un temps où la France et l’Italie produisaient plus des deux tiers de la production mondiale. Toutefois les producteurs français et italiens connaissent aujourd’hui la redoutable concurrence de l’Espagne. Un autre concurrent de taille aujourd’hui: la Chine. En effet, le pays produit un grand nombre de truffes noires, moins parfumées et moins goûteuses mais aussi moins chères. Elles sont vendues souvent de façon frauduleuse.
Cependant, la France conserve deux atouts majeurs : son climat et ses sols favorables au développement du champignon. Comme toutes les produits phares, la truffe est capricieuse. Il lui faut des conditions climatiques singulières pour se développer. Contrairement à la légende, c’est le Sud-Est et non le Sud-Ouest qui est le plus grand producteur de truffe française. Les départements de la Drôme, du Vaucluse et des Alpes-de-Haute-Provence produisent une grande quantité de ces diamants noirs. Avec le réchauffement climatique, la truffe a tendance à se déplacer vers le nord. Des truffes sauvages ont même été découvertes en Ile-de-France, jusque sur les toits de Paris !
Dénicher une bonne truffe
Pour choisir une bonne truffe, il faut la sentir, il faut la tâter. Au premier abord, elle doit sentir le sous-bois et l’humus mais ensuite, elle doit exhaler d’autres parfums comme les fruits mûrs, le cuir ou le musc. Au toucher, elle doit être ferme et de bonne densité et surtout pas sèche ou trop légère. Elle se récolte pendant une saison très précise : 4 mois et demi à partir de mi-novembre jusqu’à fin mars.
C’est durant cette période qu’à lieu le marché aux truffes de Richerenches, plus grand marché de France et second d’Europe. Un spectacle à contempler au moins une fois dans sa vie. Ce sont des places d’échanges uniques. Les plus grandes tables du monde entier viennent s’y fournir. Le champignon y est soupesé, senti et négocié. Certains sites internet ou courtiers en truffes y vendent de la truffe fraîche. C’est le cas de Hervé Jardin, Président du Syndicat Truffe Noire Tricastin, Pays de Grignan et Enclave des Papes et membre de la Confrérie du Diamant noir & de la Gastronomie qui annonce une saison 2021-22 sous de bons auspices :
La saison qui s’ouvre devrait être meilleure à plusieurs titres. D’abord, la météo a été plus clémente cet été, malgré un épisode sec en septembre, contrairement à 2020-21. Et puis les restaurants seront probablement ouverts, ce qui dynamise fortement le marché,
résume M. Jardin.