Critiqué pour son silence pendant la réforme des retraites, le Républicain Laurent Wauquiez a fini par sortir de sa réserve, posant de premières pistes à quatre ans de la présidentielle.

Je ne me suis pas défilé », a-t-il assuré dans un entretien au Point. A quelques médias, il explique un « choix de la rareté » pour ne pas « être englué dans le commentaire quotidien ». Car alors « vous ne pouvez pas fournir d’idées neuves, de distance critique… Ça ne permet pas le renouvellement en 2027 ».
Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, meilleur espoir à 48 ans d’une droite exsangue, voit loin, poussé par Eric Ciotti. « Sa voix sera importante pour redresser le pays. Il est celui qui dispose des meilleures qualités pour nous mener à la victoire », a tweeté le chef des Républicains jeudi.
Depuis qu’il a quitté la tête du parti en 2019, Laurent Wauquiez s’astreint à une diète médiatique, qui l’a poussé à ne commenter qu’une fois la très disputée réforme des retraites. Un silence qui lui a été reproché, alors que son parti, en quête de figure charismatique, se déchirait encore plus.
Certains ont bien noté qu’une partie des députés issus d’Auvergne Rhône-Alpes avaient voté contre la réforme, et se sont interrogés sur l’influence du patron de la région, voire ses chances à la présidentielle de 2027. D’autant qu’une enquête a été ouverte par le Parquet national financier (PNF) après un très couteux dîner organisé par sa région à l’été 2022…
« S’il ne change pas de stratégie, clairement Laurent Wauquiez ne peut pas y aller. Il risque de tomber aux oubliettes », estime un sénateur LR, qui n’a pas oublié son refus de se lancer lors de la primaire LR pour la dernière présidentielle. « C’est étrange, on a l’impression qu’il ne sait pas saisir le moment politique… »
Wauquiez veut remettre les pendules à l’heure
Avec son retour médiatique, Laurent Wauquiez veut remettre les pendules à l’heure : il n’était pas absent mais en immersion auprès de pompiers, d’urgentistes ou de gardiens de prison…
Une façon de prendre la température du pays, et sans doute aussi de travailler à son image. Car « le plus gros obstacle pour Wauquiez est de renverser le sentiment d’insincérité » qui l’entoure, grince un cadre du parti. « J’ai appris à me remettre en question, et ça m’a fait beaucoup de bien », réplique le candidat potentiel.
Sur le fond, son diagnostic est sombre : « On est dans un pays où la décadence va en s’accélérant de façon considérable », estime celui qui cite Michel Houellebecq, parlant de « chute », de « délitement », dans une « crise de régime comparable à celle de la Quatrième République ».
Le patron de la région Aura ne renie pas les combats passés: la différence « entre travail et assistanat », l’immigration où il faut « être ferme », le régalien…. Mais il s’en prend aussi vivement aux « minorités agissantes », et à un « Etat profond » où l’administration se serait politisée. Plaidant pour supprimer « la quasi-totalité » des autorités indépendantes, il esquisse quelques pistes: recours annuel au referendum, décentralisation… Le but est de récupérer un électorat qui a fui un parti hier tout-puissant.
« Tant que le macronisme est là, c’est très difficile pour la droite d’arriver à se reconstruire », estime-t-il. Mais « en 2027 une page politique va se tourner » car « le macronisme ne va pas succéder à Macron ». Dans ce paysage où « toutes les cartes sont rebattues », « vous pouvez incarner autre chose à condition d’arriver avec des nouvelles idées, une nouvelle dynamique », estime-t-il.
Dans cette démarche, il porte des coups mesurés au président Emmanuel Macron, qui « a réussi des choses » même s’il « laisse un pays très fracturé ». Il doute en revanche de l’hypothèse Marine Le Pen, malgré ses sondages flatteurs. « Au fond d’eux, les Français savent que la mettre présidente de la République c’est une fracture de plus dans le pays », assure-t-il.