Le Palais Galliera (Musée de la Mode) à Paris organise une rétrospective d’une année féconde en termes de créativité. L’année 1997.

En 1997, Bill Clinton, alors président des États-Unis, déclare qu’il faut stopper les ravages de l’héroïne. « C’est mauvais pour la santé ». Le photographe David Sorrenti, frère de Mario, meurt d’une overdose. Le créateur Gianni Versace est assassiné à Miami. Cette année-là, le créateur Hussein Chalayan propage un premier écho au questionnement des sociétés occidentales face à la montée des extrémismes religieux, en faisant défiler six femmes en tchadors noirs, de longueurs différentes, couvrant graduellement leur nudité. Un vrai scandale.
Cette année foisonnante signe aussi la collaboration entre le maître Alexander McQueen et la chanteuse Björk, avec la couverture de son superbe album « Homogenic » sur lequel elle revêt un kimono. C’est l’année où McQueen se « lâche » et présente sa seconde collection chez Givenchy, investiguant ainsi le champ de son futur Nom de renom. C’est aussi la rencontre entre Jean-Charles de Castelbajac et le pape Jean-Paul II. Le créateur est amené à confectionner des ornements pour le clergé, mais il craint que l’arc-en-ciel qu’il propose, lié à la communauté LGBT niée par l’église catholique, soit mal accepté.
Il n’y a pas de copyright sur l’arc-en-ciel
rassure le cardinal Jean-Marie Lustiger.
Les Simpsons entrent dans l’histoire de la mode avec Walter Van Beirendonck (bien avant Balenciaga, donc). C’est aussi la première fois qu’un créateur extérieur accède au studio de création de la maison Hermès, en la personne de Martin Margiela. Il y restera jusqu’en 2003. Silvia Venturini signe également la création du cultissime sac « Baguette », qui doit son nom à sa forme, à porter incliné sous le bras.
1997 marque l’avènement de stylistes de mode devenus cultes. En effet, Thierry Mugler et ses parures s’inspire des insectes ; Ann Demeulemeester et sa collection androgyne rend hommage à la chanteuse Patti Smith ; Nicolas Ghesquière, alors directeur artistique de Balenciaga, dévoile une robe noire portée par Madonna dans le clip « Frozen » ; Rei Kawakubo chez Comme des Garçons travaille sur la déformation de la silhouette (anticipation de la montée de la chirurgie esthétique) ; Yohji Yamamoto est comblé de son hommage à la Haute Couture française ; ce sont aussi les débuts de Stella Mc Cartney dans le milieu prisé du prêt-à-porter de luxe et l’arrivée géniale et fracassante de John Galliano chez Dior.
Dès son implantation, en mars 1997, rue du Faubourg Saint-Honoré (Ier), tout le monde se souvient de Colette Rousseau et son célèbre concept-store « Colette ». Elle avait eu cette idée folle d’implanter dans le fameux Triangle d’Or parisien, à quelques encablures des pointures de la haute couture, un espace qui semblait à l’époque démesuré (700 m²) dédié à un shopping éclectique à tendance élitiste. Secondée par sa fille Sarah, cette femme tenace a mélangé sur trois niveaux, gadgets, objets design, mode, cosmétiques, parfums, livres, disques, expos, objets high tech. On se souvient des nuits passées à apercevoir en vitrine l’ombre de Colette retravaillant avec son équipe l’étalagisme et le merchandising de son magasin.
Bref, vous l’aurez compris, c’est une histoire forte, une leçon de mode que raconte l’exposition « 1997, Fashion Big Bang », organisée au Palais Galliera, jusqu’au 16 juillet 2023. Il faut y aller, il faut s’en imprégner.
« 1997, Fashion Big Bang » au Palais Galliera musée de la Mode de la ville de Paris, 10 Av. Pierre 1er de Serbie, Paris (XVIe). t/ 01 56 52 86 00. Ouvert de 10h à 18h, de mardi à dimanche, nocturne les jeudis jusqu’à 21h. Fermé le lundi et le 1er mai 2023. De 15 € (tarif plein) à 13€ (tarif réduit), gratuit pour les moins de 18 ans. Plus de renseignements ici